" J'adore lui faire des petits bisous sur la bouche, c'est trop mignon ! " De plus en plus de mamans trentenaires (et quelques papas) embrassent leurs petits sur la bouche à la maison comme à l'école, sous l'oeil amusé de certains, ou carrément très choqué des anti-smacks en famille. Chez les people, Jessica Alba déclarait récemment qu'elle n'aimait rien tant que déposer sur la bouche de ses filles des monceaux de bisous comme marque de son amour maternel, tout comme Beyoncé qui, sur Instagram, a posté un cliché d'elle smackouillant Blue Ivy. Quant à Cristiano Ronaldo, il déposait récemment sur les lèvres de son fils de 4 ans (Cristiano Ronaldo Jr, ndlr...), un rapide baiser lors du tournage de la campagne Tag Heuer. Prescriptrices de tendances, les stars affichent donc le smack en famille comme tendance acceptée. Mais est-elle acceptable ?
Car si ce geste divise tant les parents, en témoignent les centaines de forums abordant la question, est-il aussi anodin que ses adeptes veulent bien s'en convaincre ? Selon Myriam Szejer, pédopsychiatre, le bisou sur la bouche est bel et bien, dans notre culture tout du moins, " le bisou des amoureux ". Ainsi, si le geste a peu d'importance quand l'enfant est petit, il pourra flirter, plus tard, avec l'interdit de l'inceste. " Quand l'enfant verra à la télévision les gens s'embrasser sur la bouche, il comprendra bien qu'il s'agit de tout à fait autre chose ". Les parents devraient donc, pour bien faire, se l'interdire. " C'est intrusif d'élever un enfant dans une société où on lui dit que l'inceste est interdit et, d'un autre côté, de le pousser à adopter des pratiques repérées comme celles que les adultes utilisent dans une ambiance de sexualité. "
>> Se faire surprendre au lit par un enfant : comment réagir ? <<
Si l'enfant est lui-même demandeur, c'est à l'adulte de poser les interdits en lui signifiant qu'on ne peut pas faire un bisou d'amoureux avec son père ou sa mère. Point.
Ca n'est donc pas tant le geste, en soit, qui est condamnable mais bien les frontières entre la sexualité et la sphère familiale qui sont à poser. Dans une culture où le baiser sur la bouche ne serait aucunement assimilé au désir, le raisonnement ne serait évidemment pas le même. Originellement, les mères déposaient bien la nourriture mâchée dans la bouche de leurs petits. Mais c'était bien avant les mixers, les petits pots et l'avènement de François Dolto, maîtresse ès psychologie infantile. " Une maman n'embrasse pas son enfant sur la bouche " : la maman de Carlos a été claire, et nos parents ont, bien souvent, suivi l'injonction, désireux de ne pas traumatiser cette progéniture dont il a tout à coup semblé indispensable de préserver le fragile équilibre.
Pourtant, Dolto avait ajouté : " le petit humain sait tout dès qu'il est né. " Comme dans un régime, la génération X a donc pioché selon ses envies dans les préceptes de l'experte, préférant se dire que s'il comprenait tout, l'enfant savait bien qu'il n'allait pas épouser maman, ni papa, même s'il dormait avec eux (ou entre eux), leur faisait des câlins, prenait son bain en leur compagnie et leur collait à l'un et à l'autre un bon gros smack pour se souhaiter une bonne journée et à ce soir.
Las, même Edwige Antier, autrice de " Dolto en héritage ", est formelle. Dans une chronique du Parisien, en 2005, elle persistait dans l'interdiction de cette nouvelle attitude : " Le sens du baiser sur la bouche, dans notre culture, est parfaitement perçu par l'enfant comme le symbole d'une intimité amoureuse. Il ne s'y trompe pas. (...) La génération post-Dolto a eu tendance à caricaturer sa pensée lorsqu'elle disait l'enfant sait tout, croyant pouvoir intégrer les petits à notre sexualité adulte sans danger. "
En bref, embrasser ses enfants sur la bouche, ça n'est pas bien. Et si les parents ne pensent pas à mal en s'adonnant à cette pratique trop mimi avec leurs mini-me, ils leur rendraient service en se l'interdisant. Et puis, une joue rebondie, c'est bien plus émouvant, non ?