C'est une nouvelle historique. Suite au premier grand procès climatique de France, le tribunal administratif de Paris a jugé ce 3 février l'Etat français responsable de "manquements dans la lutte contre le changement climatique" et de "préjudice climatique". Au coeur du jugement, des accusations "d'inaction climatique", notamment en ce qui concerne la (non) réduction des émissions de gaz à effet de serre ces dernières années.
Et à l'origine de ce procès, l'initiative militante de quatre associations de défense de l'environnement, comme la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace ou encore la bien-nommée Notre Affaire à Tous. La prise à partie de l'Etat français avait été abondamment médiatisée en mars 2019, sous l'intitulé choc d'"Affaire du siècle". Elle avait fait l'objet d'une pétition aux deux millions de signatures, excusez du peu. La situation était déjà urgente.
Elle l'est encore désormais. Directrice générale au sein de Notre Affaire à Tous, Cécilia Rinaudo est ravie : "Le juge, à travers cette décision, a reconnu les effets mais aussi les dangers du changement climatique. La reconnaissance du préjudice écologique n'existait, jusqu'à maintenant, que dans le droit privé. Cette décision est donc historique pour la France, mais aussi au niveau international", explique-t-elle à 20 Minutes. Une page se tourne.
En attendant des actes - concrets. "Ce n'est que le début, affirme encore l'activiste. C'est une première victoire énorme. Cela signifie qu'aujourd'hui, nier l'urgence de l'action climatique est devenu une faute". Justement, c'est une même question qui monopoliste toutes les lèvres : maintenant, que va-t-il se passer au juste ?
Des gestes sincères, on l'espère. Comme l'explique 20 Minutes, l'Etat a encore deux mois pour fournir de nouveaux documents "afin de soumettre les observations non communiquées des ministres" au tribunal administratif de Paris. De plus, précise celui-ci, il n'a pas d'obligation à partager publiquement "les injonctions à agir qui pourraient être prises". "Les objectifs fixés n'ont pas été atteints", admet le ministère de l'Ecologie à propos de ses ambitions écoresponsables passées, notamment son devoir de respecter les directives de l'Accord de Paris.
Comme le développe France Inter, l'État se doit de répondre au préjudice moral dont il est a été reconnu coupable "à hauteur d'un euro symbolique". Pas si affolant en comparaison de l'enjeu exprimé - la lutte contre le réchauffement climatique. Aucune demande de réparation n'a été retenue par le tribunal, au grand dam des ONG qui la réclamaient. Pour l'instant, l'Etat n'a aucune obligation juridique à agir pour réparer ses torts. Mais sa légitimité, non seulement nationale mais internationale, en prend un coup. Telle sa propension "à s'engager sur des promesses sans donner de moyens concrets pour y parvenir", nous dit-on.
En deux mots ? "L'Etat n'est pas tenu de réparer le préjudice écologique causé par le changement climatique", synthétise sur les ondes de France Culture l'avocat Arnaud Gossement. Au temps du premier confinement, comportements individuels et mesures gouvernementales n'étaient pas plus enthousiasmantes d'un point de vue écoresponsable, nous expliquaient de nombreuses voix militantes. Si la finalité de ce procès historique réjouit, elle n'augure pas vraiment un bouleversement de l'ordre des choses dans le monde d'après.