C'est une date à retenir. Ce vendredi 14 juin, les citoyennes suisses sont appelées à faire grève afin de revendiquer l'égalité entre hommes et femmes. Un vaste mouvement coordonné par Anne Fritz - l'un des visages de l'Union syndicale suisse. Le 14 juin 1991, elles étaient déjà 500 000 à scander leurs revendications dans la rue. On espère en voir autant fouler l'asphalte demain.
"La grève sera partout !", lit-on sur le site officiel de l'événement. Et la raison, elle, est aussi simple que plurielle : exiger l'égalité salariale, une égale répartition des tâches ménagères, la création du congé paternité, une plus nette considération des discriminations systémiques et, plus globalement, l'égalité des droits entre hommes et femmes - que celles-ci soient femmes au foyer, salariées, étudiantes, du travail domestique au médical.
Cette égalité des sexes était pourtant au coeur d'un article intégré à la Constitution suisse en 1981. Mais force est de constater qu'en 2019, il y a encore beaucoup à faire dans un pays où les femmes gagnent 20 % de moins que les hommes. "Nous en avons assez ! Nous ne sommes ni respectées, ni rémunérées selon les normes fixées par la loi. Dans la rue et au travail, le sexisme atteint nos vies, nos corps. Suissesses, immigrées, réfugiées, quelle que soient la couleur de notre peau, notre orientation sexuelle, notre statut social et notre âge, nous sommes exposées à des violences et discriminées d'une manière ou d'une autre", clament à ce titre les militantes.
Décochées sur le compte Instagram de l'événement, les revendications de ces anonymes ont autant trait à la charge mentale qu'au sexisme ordinaire, au harcèlement de rue comme à la transphobie. Battre le pavé sera donc une manière pour les jeunes générations d'investir la place publique en fustigeant les diverses formes d'oppression d'un système (encore) trop patriarcal, où la dépénalisation de l'avortement n'est appliquée que depuis dix-sept ans. Quelques figures médiatiques, comme l'humoriste pop-féministe Marina Rollman, comptent bien apporter leur voix à cette mobilisation aux dominances violettes, couleur emblématique des Suffragettes.
Un événement loin d'être anecdotique donc. Surtout qu'à bien y réfléchir, la condition des femmes en Suisse n'est pas si éloignée des problématiques qui secouent l'Hexagone. "Les luttes des femmes suisses ressemblent aux luttes des femmes partout dans le monde : elles non plus elles n'échappent pas au harcèlement, aux violences sexuelles, à la misogynie généralisée", déplore en ce sens la journaliste Victoire Tuaillon, à qui l'on doit quelques captivants podcasts sur la genèse et le revival de cette indignation féministe.