Du bikini à l'arbalète, tel pourrait être l'intitulé du parcours vers la radicalisation d'Hayat Boumeddiene, la femme la plus recherchée de France. A 26 ans, elle est suspectée d'avoir aidé son compagnon, Amedy Coulibaly, à mettre en place la prise d'otages du magasin Hyper Cacher de la Porte de Vincennes (quatre morts) et la fusillade de Montrouge (Hauts-de-Seine, un mort). La veuve du terroriste aurait pu avoir, aux dires des enquêteurs, « un rôle logistique » dans les attaques. Elle a d'ailleurs été plus de 500 fois en contact par téléphone avec la compagne de Chérif Kouachi, l'un des auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo, d'après le procureur de la République de Paris, François Molins.
« Lorsque j'ai vu que l'auteur du meurtre de Montrouge et de la prise d'otages de Vincennes s'appelait Amedy Coulibaly, j'ai su tout de suite que c'était le mari d'Hayat », confie dans les colonnes du Parisien, ce lundi 12 janvier, une des amies d'enfance de la jeune femme. Cette dernière affirme l'avoir vue pour la dernière fois, « il y a un mois » lors d'un « dîner de filles chez son père, à Villiers-sur-Marne (Val-de-Marne) ». Et de poursuivre : « Elle voulait nous offrir des cadeaux qu'elle nous avait ramenés de La Mecque, où elle avait fait le pèlerinage avec Amedy en octobre dernier ».
La même proche évoque une femme « impulsive », « fragile émotionnellement » et « un peu gamine », qui a perdu sa mère à l'âge de 8 ans et fait un rapide passage en foyer quatre ans plus tard. C'est après sa rencontre avec Amedy Coulibaly, avec qui, toujours selon la proche citée par Le Parisien, elle entretenait « un amour fusionnel » et se marie religieusement en 2009, que la jeune femme « change ». « Elle me disait : "la France, c'est un pays qui ne sert à rien" ».
Ainsi, le contraste est saisissant entre des photos découvertes par les enquêteurs, montrant la jeune femme en bikini avec son compagnon, lors de vacances en 2008 ou 2009, et d'autres clichés publiés sur lesquels Hayat Boumeddiene apparaît intégralement voilée, arbalète en main. Des photographies prises par le couple, en 2010, au cours d'un séjour dans le Cantal, chez Djamel Beghal, alors assigné à résidence à Murat.
Ce Franco-algérien, appelé également « Abou Hamza », est une figure de l'islamisme radical, condamné à dix ans de réclusion pour avoir fomenté un attentat contre l'ambassade des Etats-Unis à Paris. Amedy Coulibaly, condamné pour plusieurs braquages, aurait pour la première fois croisé sa route, en 2005, derrière les murs de la prison de Fleury-Mérogis. Depuis qu'il a retrouvé la liberté, Beghal aurait reçu plusieurs visites du couple Coulibaly-Boumeddiene.
« Je sais qu’Amedy l’a rencontré en prison », expliquait-elle aux enquêteurs de la Sous-direction antiterroriste, en 2010, après l’arrestation de son compagnon dans le cadre d’une tentative d’évasion de Smain Ait Ali Belkacem, un des responsables de la vague d’attentats à Paris en 1995. « A l’occasion de ces déplacements, je me suis rendue compte que Hamza avait beaucoup de livres sur la religion et de ce fait, il m’est arrivée de lui poser des questions sur la religion alors que nous nous trouvions dans deux pièces différentes pour ne pas se voir. J’étais dans une pièce et lui dans l’autre », avait-elle expliqué.
La femme louait, depuis l'été 2012 avec son époux abattu lors de l'assaut de vendredi, un studio à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) qu'elle avait prévu de quitter « dès la fin du mois », selon BFMTV. Hayat Boumeddiene se trouverait actuellement en Syrie, après avoir transité par la Turquie le 2 janvier dernier, selon une source sécuritaire turque.