Le film « Les femmes du bus 678 » se déroule dans l'Egypte d'aujourd’hui (mais avant les révolutions arabes). Trois femmes issues de trois milieux différents s’unissent pour combattre le machisme agressif et impuni. Fayza, Seba et Nelly veulent humilier ceux qui quotidiennement les humilient. Une situation bien connue d’une société basée sur la suprématie de l’homme. Et justement c’est un homme qui, en réalisant ce film, veut dénoncer ce phénomène d’agression systématique des femmes. Mohamed Diab a choisi un sujet sensible dans son pays, le harcèlement sexuel : « en tant qu'homme, écrire ce film a été un réel défi » nous a-t-il confié au cours d'un entretien.
En Egypte, ce sont 83 % des femmes qui déclarent avoir été agressées sexuellement par des hommes, peu importe leurs milieux ou leurs origines. Le premier procès de harcèlement sexuel a eu lieu en 2008, il est raconté dans ce film. Mais être harcelée sexuellement reste encore une honte surtout pour les familles des victimes, en particulier les hommes : « La réaction des hommes dans le film est choquante, mais je ne l'ai ni amplifiée ni changée. Le harcèlement sexuel est vraiment vécu de cette manière par les Egyptiens », explique Mohamed Diab. Et c’est pour cette raison que trouver trois actrices pour jouer les victimes a été difficile pour le réalisateur. Mais il était important pour lui de raconter l’histoire de trois femmes : « Si je n’avais fait le film que sur une des filles, on m’aurait fait des reproches. Les trois femmes sont issues de trois milieux sociaux complètement différents, ce qui montre que le harcèlement sexuel concerne toutes les femmes et qu’il est présent de différentes manières ».
« Les femmes du bus 678 » a été diffusé en Egypte un mois après le Printemps arabe et a suscité de vives réactions, « mais plutôt bonnes dans l’ensemble », tient à préciser son réalisateur : « Les femmes qui ont vu le film me disent qu’elles se sentent plus fortes et qu’elles ont envie de se battre pour lutter contre le harcèlement sexuel et faire changer les mentalités ». Aujourd’hui le Printemps arabe a nourri les espoirs et les rêves de changement pour les femmes, mais aussi pour toute la population égyptienne. Mohamed Diab nous confie d’ailleurs : « J’ai envie de faire un film sur les révolutions arabes quand elles seront complètement finies. Mais je voudrais que ce film montre le commencement des révolutions, je veux montrer pourquoi elles ont eu lieu et comment elles se sont déclenchées, comment on en est arrivé là en Egypte ».
Entretien réalisé à l’hôtel Alba Opéra, à Paris.
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Sarah Jumel
Crédit photo : PYRAMIDE PRODUCTIONS
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