Depuis la consécration de La Vie d'Adèle, auréolé d'une Palme d'or au dernier Festival de Cannes, son réalisateur Abdellatif Kechiche et ses méthodes de travail « discutables » sont l'objet de vives critiques. Accusé tour à tour par les techniciens du film, puis par Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos de s'être montré tyrannique, imposant des conditions de tournage épouvantables et un rythme de travail infernal, le réalisateur a décidé de répliquer.
Alors que La Vie d'Adèle, dans les salles depuis quinze jours, a été unanimement loué par les critiques, Abdellatif Kechiche ne semble pas résigné à tourner la page si vite. Dans une longue tribune publiée sur Rue89 dans la nuit de mardi à mercredi, Abdellatif Kechiche se défend et, surtout, s'en prend violemment à ses détracteurs, à commencer par le chef du service culturel du Monde, Aureliano Tonet, et surtout à la comédienne Léa Seydoux, qui pour « peaufiner son image de star "rebelle" », n'a pas hésité à le « traîner dans la boue en débitant mensonges et outrances ».
Pour le cinéaste, ce sont ces « rumeurs nauséabondes » qui ont entouré la promotion de La Vie d'Adèle, et les « allégations calomnieuses » à son encontre ont définitivement entaché sa réputation de cinéaste et contribué au succès public relatif du film.
Dans le viseur d'Abdellatif Kechiche, notamment, le service culturel du quotidien Le Monde, dirigé par le journaliste Aureliano Tonet. Le réalisateur l'accuse d'avoir écrit un portrait peu flatteur à son encontre, alors que le film était tout juste présenté à Cannes. Surtout, il lui reproche d'avoir relaté dans les pages du journal des « anecdotes de tournage » de La Vie d'Adèle décrites par des « techniciens anonymes » plus d'une année après la fin du tournage. Et d'avoir publié sur Lemonde.fr le « communiqué polémique d'un syndicat m'accusant, moi et ma "méthode", d'avoir fait subir de terribles abus aux techniciens de Lille sur le tournage de La Vie d'Adèle, un an auparavant : harcèlement moral, violations graves et nombreuses du code du travail, humiliations, méthodes de "tyran" passibles de poursuites ou de la camisole. Et j'en passe ! […] Donner la parole à des accusateurs ne fait certes pas de vous un accusateur, mais relayer, ouvrir sans distance critique ses colonnes dans une série d'articles cités en boucle par toute la presse et offrir son crédit de "journaliste sérieux" sans vérifier des propos et des accusations aussi graves, aux conséquences aussi lourdes […] sans même m'interroger, moi, alors que je suis directement et si violemment mis en cause […] cela relève d'une attention pour le moins curieuse à mon endroit de la part d'un journaliste d'un quotidien aussi prestigieux. » Amer, il poursuit : « Ce qui a été écrit et publié contre moi aurait détruit une fois pour toutes ma carrière de cinéaste si mon film n'avait pas été primé à Cannes. Aussi je ne remercie pas ceux qui, au sein de la rédaction d'un quotidien de qualité aussi recommandable que Le Monde d'avoir, avec de pareilles façons de faire, gâché ce qui aurait pu être une très belle fête du cinéma français. »
Mais c'est avec Léa Seydoux qu'Abdellatif Kechiche se montre le plus virulent. Pour le réalisateur, la comédienne a fait naître, à la rentrée, une « polémique, bien plus ignoble et détestable dans le fond que la première » pour « [le] salir » et le « blesse profondément ». « Mademoiselle Seydoux, après m'avoir maintes fois remercié publiquement et en privé et avoir pleuré dans mes bras à Cannes pour lui avoir permis d'y camper un rôle aussi noble, de l'avoir sublimée et de lui avoir tant appris sur l'art dramatique, a, contre toute attente et tout cohérence personnelle, changé radicalement d'attitude envers moi au risque de démolir, à quelques semaines et jours de sa sortie, un film déjà fragilisé. » Et de blâmer les propos de la comédienne, où il apparaît comme une « espèce de sadique et de pervers manipulateur, qui aurait fait tourner complètement nues deux jeunes comédiennes des scènes de sexe dix jours non-stop » et les aurait « humiliées, violées et violentées psychologiquement » durant le tournage.
Pas un mot, en revanche, pour Adèle Exarchopoulos, qui elle aussi évoqué le caractère difficile d'Abdellatif Kechiche avant de se rétracter et d'assurer qu'elle accepterait volontiers de travailler à nouveau avec le cinéaste.
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