56 millions de dollars de recettes aux Etats-Unis, des critiques positives, une salve de publications virales sur les réseaux sociaux et un marketing tonitruant... M3GAN est le nouveau petit phénomène du cinéma d'horreur, en salles en France depuis le 28 décembre 2022. Petit, car il s'agit... d'une poupée. Une poupée tueuse forcément, héroïne d'une production Blumhouse, studios à qui nous devons bien des séances tendax comme American Nightmare, Get Out, Invisible Man...
Cette nouvelle création imaginée par le cinéaste James Wan (Insidious, Conjuring, Malignant) qui met en scène ni plus ni moins qu'une cyberpoupée, intelligence artificielle conçue pour satisfaire les enfants. Mais on l'imagine, tout ne se passera pas vraiment comme prévu.
Tiendrait-on là une simple relecture de Chucky, autre poupée maléfique mythique ? Pas forcément. Les fans érigent déjà Megan en figure singulière, à part entière. Et parmi cette fanbase, on retrouve la communauté LGBTQ. Qui voit en la poupée... une icône queer.
Mais pourquoi cela ? A cause de l'intrigue. Effectivement, M3GAN raconte l'histoire de Cady, une petite fille orpheline, qui va trouver en cette poupée une alliée - un peu trop "alliée" d'ailleurs puisqu'elle tue quiconque se dresse sur le chemin de son amie. Cady serait alors à la fois soutenue par sa tante, qui l'a adoptée, et cet autre personnage féminin. Or, cette thématique de l'adoption "résonnerait pour beaucoup de gens dans la communauté gay, puisqu'elle rejoint l'idée de famille retrouvée", analyse le média The Gamer.
S'amusant de cette réception, le Guardian l'assure : "M3GAN est juste scandaleusement camp". Le "camp", c'est une esthétique reconnaissable par son exubérance, son excentricité, son goût prononcé de l'exagération et du kitsch. Un second degré notamment perçu à travers le personnage-titre : avec son style de "reine des abeilles", ses danses (car oui, elle danse) et ses poses hyper féminines, "cette poupée est essentiellement une drag queen tueuse", décrit ainsi The gamer.
Par son apparence et sa gestuelle, M3GAN s'amuse des codes de la féminité prétendument "candide" et transforme le tout en jeu de massacre. Un décalage soutenu par la promotion du film. Ainsi a-t-on pu voir outre-Atlantique une bande de danseurs déguisés en poupées, les M3gans, interpréter une chorégraphie en l'honneur du film lors de sa première, la chanson It's Nice to Have a Friend de Taylor Swift en fond sonore. Un usage très ironique.
Cette réception amuse la co-scénariste du film, Akela Cooper. Du côté de Vanity Fair, celle-ci a réagit : "Je n'avais pas l'intention de créer une icône gay. Je l'imaginais surtout en tenue d'écolière, avec la taille d'un enfant de huit ans. Mais en découvrant le design, je me suis dit : 'Putain de merde, on la dirait tout droit sortie d'une sororité'", a commenté non sans humour la scénariste. Sam Wineman, réalisateur de films d'horreur queer, aurait même assuré à cette dernière durant la première projo : "Akela, tu viens de créer une icône gay".
Une assertion appuyée par le magazine des cultures LGBTQ Out, qui voit dans ce film "un classique du cinéma d'horreur sur les familles queer", aussi étonnante dans ses sous-entendus que généreusement gore. Alléchant.