Manara. Trois syllabes pour une légende de l'art graphique. On connaissait le dessinateur et scénariste italien Milo Manara pour ses classiques de la bande dessinée érotique, comme Le déclic ou Le Parfum de l'invisible. Des récits de jeux et d'éveil des sens, de sensualité et d'émois féminins. Les femmes, l'artiste n'a d'ailleurs jamais cessé de s'y intéresser. Et en pleine pandémie mondiale de coronavirus, elles incarnent toujours, à ses yeux, l'origine mais aussi le centre du monde.
La preuve ? Manara le démontre en dessins. Sur son compte Instagram, cet ami du grand Frederico Fellini a délivré quelques esquisses afin de rendre hommage à toutes ces héroïnes qui n'ont pas cessé d'oeuvrer pour autrui au temps du confinement. Les soignantes bien sûr, mais également les conductrices de métro, les kiosquières, les couturières (bien souvent bénévoles), les boulangères, les pompières...
Des dessins énamourés (et déjà mis en vente) qui, sans sexualiser ces protagonistes, mettent l'accent sur leur bravoure, leur charisme et leur "badasserie". Un "Vous les femmes" salué par des milliers de likes.
Au gré de ces aquarelles très peaufinées, Manara met en vedette toutes celles qui, à l'heure du déconfinement, retrouvent malheureusement leur statut de femmes invisibles - ignorées, malmenées, sous-traitées et payées. Or pour l'artiste, le fameux "monde d'après" est avant tout féminin. N'en déplaisent à ceux qui genrifient trop vite les professions. Pompier, chef de chantier, agent de la circulation ou encore agriculteur ne sont pas que des métiers masculins, et le dessinateur le démontre sur sa page Instagram, illustrations pêchues à l'appui.
C'est donc tout un monde, placé sous le signe de l'égalité professionnelle, que dépeint Manara. S'y côtoient agentes de sécurité et vétérinaires, femmes scientifiques (rappelons que c'est à la grande biologiste June Almeida que nous devons la découverte du premier coronavirus) et aides-ménagères. L'espace de quelques esquisses, l'auteur vrille même volontiers à l'iconisation la plus jubilatoire. Comme lorsqu'il imagine une ouvrière de chantier arborer la pose mythique de Rosie la riveteuse, cet emblème fascinant du féminisme.
"Bonne chance à toutes, même aux professions qui n'ont pas été représentées mais qui sont tout aussi importantes, et soyez prudentes. Il est aussi temps pour moi de retourner au travail", a décoché l'artiste en guise de conclusion à cette série de portraits solidaires intitulée Lockdown Heroes : les héroïnes du confinement. Ces créations seront d'ailleurs réunies dans un recueil du même nom, à paraître en librairie le 30 juillet prochain.