"Ce drame qui a dévasté les familles s'est produit en sortie de discothèque et sur fond d'alcool". Voilà comment Me Michel Labrousse, l'avocat du meurtrier présumé de la jeune Justine Vayrac, a contextualisé le féminicide. La jeune femme de 20 ans avait été aperçue pour la dernière fois le dimanche 23 octobre au petit matin près d'une discothèque de Brive-la-Gaillarde (Corrèze) en compagnie de Lucas L., une connaissance.
Ce jeune homme de 21 ans, principal suspect, a rapidement avoué en garde à vue avoir violé et tué Justine Vayrac, puis a été mis en examen pour meurtre, séquestration et viol ce 27 octobre. Mais, pour son avocat, l'alcool semblerait donc être une circonstance atténuante.
Or, au contraire, il est important de rappeler que, depuis la loi du 24 janvier 2022, la consommation d'alcool et de drogue peut être une circonstance aggravante d'un meurtre ou de violences volontaires ayant entraîné la mort.
Les proposde Me Michel Labrousse nécessitent de rabâcher encore et encore que rien n'excuse un viol (ni la tenue de la victime, ni l'heure, ni l'endroit, ni le fait que la victime et/ou son agresseur aient été en état d'ébriété...). Soutenir le contraire et utiliser cet argument comme une "excuse recevable" auprès des médias participe à entretenir la culture du viol, à savoir les attitudes et les comportements qui minimisent, normalisent, voire encouragent les violences sexistes et sexuelles.
D'autant que de nombreux stéréotypes sexistes et dangereux persistent. Ainsi, d'après une étude publiée en 2022 par l'association Mémoire traumatique et victimologie, 23% des Français considèrent que si des femmes ont pris de l'alcool ou de la drogue, cela déresponsabiliserait le violeur.
Cette sortie de l'avocat de Lucas L. n'a pas manqué de faire réagir sur les réseaux sociaux.
La militante et autrice Rose Lamy, à l'origine du compte féministe @preparez_vous_pour_la_bagarre, a également réagi.
Comme dans malheureusement trop d'autres affaires de féminicides, l'homme est largement "humanisé" dans les médias, et l'on s'émeut presque de la peine encourue, à savoir "la réclusion criminelle à perpétuité", comme l'a rappeleé le procureur de Limoges Baptiste Porcher lors d'un point-presse.
Comme le souligne Rose Lamy, dans un article du Parisien, Lucas L. est ainsi présenté comme "l'enfant du village", qui "cultivait son amour pour les vaches limousines dont il postait même des photos sur son compte Instagram". On parle des passions de l'auteur présumé des faits, on fait témoigner ses amis, sa famille et même son entraîneur de foot.
On précise que "un dimanche, il y a une semaine, Lucas avait aidé un habitant de la commune à installer un portail sur sa propriété". Parce que c'est bien connu, installer un portail pour quelqu'un vous immunise contre tout soupçon de viol et de meurtre.
Me Michel Labrousse persiste et signe : son client est "un individu normalement constitué", au "profil tout à fait normal, équilibré", a-t-il ainsi souligné, comme le relaie Franceinfo. "C'est un jeune homme de bonne famille, éduqué, intelligent, qui pratique un sport, qui a une vie sentimentale normale", décrit l'avocat.
Il assure que "rien ne pouvait laisser penser" que son client "puisse commettre l'acte qu'on lui reproche". "Il nous faudra savoir si au niveau psychologique, psychiatrique, si son passage à l'acte a des explications techniques", ajoute Me Michel Labrousse.
Pourtant, bien que n'ayant jamais été condamné, le suspect avait déjà été "mis en cause dans une procédure de destruction par moyen dangereux et dégradation", a précisé le procureur de Limoges. À ce titre, le jeune homme avait été "mis en examen et placé en détention provisoire" jusqu'en avril 2021. Il faisait l'objet d'un contrôle judiciaire.