Le 28 novembre, la blogueuse fitness norvégienne Caroline Berg Erisken a déclenché la colère des internautes en postant sur Instagram un cliché où elle exhibe, quatre jours après son accouchement, sa silhouette de sylphide et son ventre plat. Si de nombreuses femmes, à l'image de la journaliste norvégienne Suzanne Aabel y ont vu une « déclaration de guerre » aux femmes qui affichent quelques kilos superflus après leur grossesse, se cache en réalité derrière ce selfie « hautement provocateur » un trouble alimentaire qui touche de plus en plus de futures mamans.
Son nom ? La « mummyrexie » (contraction de « mummy » et d'« anorexie ») ou « pregnorexia » (contraction de « pregnant » - enceinte et d'« anorexie ») : pour empêcher que d'inévitables kilos post-grossesse plombent leur silhouette, les futures mères n'hésitent pas à suivre un régime alimentaire et à pratiquer du sport à un niveau intensif, parfois jusqu'au troisième trimestre.
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Apparue aux États-Unis, cette nouvelle lubie minceur a récemment gagné la France, au grand dam du corps médical. En témoignent les multiples témoignages de jeunes mamans sur les forums de conversation, repérés par L'Express : « J'ai perdu 6 kilos pendant ma grossesse et mon bébé se porte très bien », note une internaute, tandis qu'une autre raconte fièrement : « J'étais complètement obsédée à l'idée de ressortir de la maternité obèse, du coup j'ai vraiment fait très attention à ce que je mangeais pendant 9 mois. Résultat : deux semaines après ma sortie de la maternité, je pouvais de nouveau rentrer dans du 36. »
Pourtant, rappellent les médecins, cette quête de l'éternelle minceur, même quand on attend un enfant, n'est pas sans danger pour sa santé... ni pour celle de son bébé. Les futures mères voulant vivre une grossesse XXS s'exposent ainsi des carences en fer, en vitamines ou en calcium, et une diète trop drastique risque d'entraîner une naissance prématurée de son bébé et des retards de développement. D'autant que cet hyper contrôle de son poids pendant la grossesse a des conséquences évidentes sur la construction du lien mère-enfant. Éloïse, 34 ans, témoigne dans Grazia : « J'étais tellement focalisée sur les déformations que subissait mon corps à cause du bébé que j'en suis venue à lui en vouloir. »
Parfois même, la mummyrexie empêche les futures mamans d'arriver au terme de leur grossesse. Dans les pages du magazine Grazia, qui avait consacré en novembre 2012 une enquête sur ce trouble alimentaire, Sassou, 29 ans, raconte : « J'étais enceinte de 6 mois quand j'ai compris que quelque chose clochait : je ne sentais plus mon bébé bouger. Quand les médecins ont posé les patchs de l'électrocardiogramme, son cœur ne battait déjà plus. Mon fils est mort de faim dans mon ventre. Et c'est de ma faute : même enceinte, je voulais garder ma ligne à tout prix. »
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Mais d'où vient cette obsession de garder la ligne alors que l'on attend un enfant ? Pour de nombreux spécialistes, l'explication se trouve du côté de Hollywood, où les stars exposent un mini-ventre dans les rues de Los Angeles alors qu'elles sont enceintes de 8 mois. Victoria Beckham, Nicole Richie, Miranda Kerr et même Kate Middleton sont aujourd'hui accusées de donner aux futures mères une image erronée de la grossesse. Interrogé par L'Express, le psychiatre Gérard Apfeldorfer explique : « Les stars légitiment cette pratique, mais la mummyrexie s'inscrit dans un contexte plus général d'intolérance sociale au surpoids. Ces femmes vivent une sorte de déni de grossesse : elles veulent l'enfant mais pas la grossesse. Or, ce ne sont pas elles qui grossissent mais leur enfant. » Et de rappeler que si les femmes prennent en moyenne 12 à 15 kilos pendant leur grossesse, celle-ci nécessite une prise de poids de 7 kilos (fœtus et liquide amniotique) minimum pour garantir la bonne santé de son bébé à la naissance.
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