L'emploi du temps de Caroline Bardot est plein à craquer ; chaque soir, après le travail, une « seconde vie » l’attend. L’engagement politique au sein du Parti Communiste Français, voilà ce qui occupe cette inspectrice du travail de 28 ans. À quoi s’ajoutent ses multiples responsabilités d’élue des Hauts-de-Seine (92): conseillère municipale de Nanterre depuis 2008 et conseillère régionale d’Île-de-France (Front de gauche) depuis 2010. « En ce moment, j’ai des réunions tous les soirs », confesse-t-elle. Et de dérouler énergiquement : «Lundi, j’étais en réunion ; ce soir j’ai conseil municipal ; cette semaine, réunion CGT, et la semaine dernière, j’ai participé à la grève des postiers de Nanterre et à celle des inspecteurs du travail ». Et le soutien de Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle, dans tout ça ? Présente, encore ! Sur les marchés, par exemple, pour distribuer des tracts. Le dialogue, la persuasion, le b-a ba du militantisme, en somme. La jeune femme aurait pu s’en lasser, aspirer aux postes décisionnels du parti. Très peu pour elle. « Je suis une militante pure et dure. Je n’ai jamais souhaité monter en hiérarchie. De toute façon, j’ai rapidement été élue, l’année où j’ai commencé à travailler ».
Le terrain, colonne vertébrale de son engagement politique. Il fallait, pour ça, un terreau propice : la faculté de Nanterre, agitée et frondeuse, où elle suit à partir de 2005 des études de sociologie et d’économie. Cette originaire du Gard, fraîchement débarquée de sa prépa littéraire à Nîmes, y rencontre « une vraie famille politique ». Elle y fréquente des étudiants communistes, et suit de près les actions de l’UNEF [syndicat étudiant de gauche ndlr]. Avant cela, elle ne se considérait que comme une « jeune révoltée par un tas d’injustices » incapable de se situer sur l’échiquier politique. Le 21 avril 2002 provoque une prise de conscience éclair. On est loin de l’éveil feutré à la politique dans le confort d’une culture familiale partagée. « J’en ai pleuré », se souvient-elle. Plus de doute possible après ça, elle est « à gauche voire à l’extrême-gauche » et participe dans la foulée à la manifestation organisée par son lycée contre la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour. Son adhésion au PCF intervient lors du débat national sur le traité constitutionnel européen (TCE). « Séduite par les idées et les valeurs » du parti communiste qui fait campagne pour le non, elle prend part à la grosse mobilisation de l’université sur ce sujet. Mais avant les émois de l’action collective, place au bachotage : « Il a d’abord fallu apprendre, c’est-à-dire lire le traité. En s’aidant de la vulgarisation réalisée par l’association Copernic et par L’Humanité ».
Dans quelles valeurs communistes la jeune militante se reconnaît-elle ? « Le respect des uns et des autres dans notre grande diversité et la solidarité », répond-t-elle du tac-au-tac. Plus qu’un mouvement politique, le PCF est devenu le foyer de concentration de ses interrogations d’étudiante, où pouvaient s’engendrer pensée et décision. « Adhésion du cœur » et de l’esprit, donc. « La sociologie m’a ouvert un horizon de compréhension, elle m’a fourni une manière de regarder les choses qui n’est pas simpliste », reconnaît-elle. Donner sa place à chacun, le « laisser faire » en fonction de ses talents et « l’investir », tel est le credo du PCF. Une stratégie qui se retrouve dans l’animation de la campagne présidentielle. Les plus jeunes militants ont un faible pour la colle et les affiches ? Va pour le placardage. Quant à ceux qui maîtrisent avec doigté les réseaux sociaux, direction la blogosphère. La jeune élue communiste cite encore l’exemple d’une amie militante au RSA qui organise maintenant des réunions en direction des chômeurs. Sur le fond, le parti a organisé « beaucoup de réunions en amont sur le programme partagé », sur les thèmes de la VIe République, de la crise, de l’Europe, afin de ne pas rééditer l’échec des collectifs unitaires de 2007 qui avaient abouti à une double candidature (José Bové et Marie-George Buffet) pour l’extrême-gauche. La seconde phase de la campagne mise sur la rencontre des citoyens, avec le porte-à-porte, le tractage à la sortie du RER ou la mobilisation des réseaux susceptibles d’apporter leur voix au candidat Mélenchon.
Mais comment s’y prend cette chargée de mission dans l’apprentissage et la formation pour gagner le soutien des réseaux éducatifs? En participant, par exemple, aux banquets dansants du parti communiste. À l’entendre, le PCF préfère de loin leur ambiance repas de famille aux meetings assommants. « Bien sûr, avant il y a un débat », nous rassure-t-elle, « mais après on mange, vachement bien même, et on danse ». « C’est l’occasion de mettre en avant les acteurs locaux », recadre-t-elle. La Fête de l’Huma constitue un autre rendez-vous incontournable du militantisme communiste. « J’y participe tous les ans depuis mon adhésion, on peut me trouver au resto, au bar ». Si Caroline Bardot est portée par cette dynamique de célébration collective, entre folklore bon enfant et culture ritualisée, elle ne perd pas de vue pour autant l’objectif électoral en avril prochain. Ainsi, sur le thème de l’insertion professionnelle des jeunes, elle relativise l’importance donnée à l’apprentissage par le président-candidat Nicolas Sarkozy, qui cite régulièrement l’exemple allemand. « Ce n’est pas la solution miracle, le vrai critère discriminant, c’est le niveau de diplôme. Il faut donc arrêter de supprimer des postes de profs dans les lycées professionnels et opter pour une complémentarité des voies de formation », analyse-t-elle. Avant de lâcher : « Et puis, l’apprentissage, c’est ni plus ni moins qu’une relation de subordination d’un individu à un patron ».
Élodie Vergelati
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