Virage à gauche. Alors qu'en 2007 il avait émis une consigne négative, appelant à ne pas voter pour Nicolas Sarkozy, cette année François Bayrou sort de sa réserve et rompt avec la tradition centriste en déclarant avoir choisi François Hollande pour 2012. Le président du MoDem, qui a totalisé 9,1% des voix au premier tour et s’était placé à la cinquième marche du podium, a cependant précisé qu’il s’agissait d’un choix fait à titre personnel. « Je ne donnerai pas de consigne de vote. Chacun de mes amis, chacun de mes électeurs s’exprimera en conscience », a-t-il souligné.
Cette annonce, prononcée au lendemain du débat télévisé de l’entre-deux tours au cours duquel se sont affrontés François Hollande et Nicolas Sarkozy, était très attendue à la fois par la majorité et l’entourage de François Hollande. « J'ai examiné depuis deux semaines l'évolution du deuxième tour de l'élection présidentielle », a expliqué M. Bayrou, qui a eu la déception d’observer un Nicolas Sarkozy qui « s'est livré à une course poursuite à l'extrême droite ». Parmi ses reproches au président sortant : son « obsession de l'immigration » et « des frontières ». Le député des Pyrénées-Atlantiques a fustigé « la ligne choisie par Nicolas Sarkozy, violente » et qui « rentre en contradiction avec nos valeurs, les miennes, mais aussi celles du gaullisme ». « Comment en est-on arrivé là ? C'est l'histoire de cette élection », a analysé le leader du MoDem.
Un choix personnel
« Je ne veux pas voter blanc, ce serait de l'indécision », a affirmé François Bayrou. « Reste le vote pour François Hollande. C'est le choix que je fais ». Un choix qui cependant n’est pas un ralliement inconditionnel au candidat socialiste. « J'ai dit ce que je pensais de son programme économique. Je pense que ce programme est inadapté à la situation du pays », a tempéré M. Bayrou, qui a affirmé qu’il resterait « un opposant, dans une opposition vigilante et constructive » en cas de victoire de M. Hollande.
Une décision saluée immédiatement par le PS, qui ne s’attendait pas à un franc soutien de la part du leader centriste. François Hollande a rendu hommage à un « vote d’indépendance » de la part de M. Bayrou qui a pris « conscience que le candidat sortant divisait et que je rassemblais, qu'il y avait un risque pour le pays s'il devait être reconduit cinq ans de plus ». « C'est un choix citoyen d'un homme qui considère que pour son pays il y a une solution à éviter », a souligné le candidat socialiste, avant de préciser : « il n'y pas de recomposition ni de sa part ni de la mienne ». Martine Aubry, première secrétaire du PS, y voit quant à elle un « choix de valeurs ».
« Une mauvaise surprise » pour Nicolas Sarkozy
« Déjà en 2007, il avait indiqué qu'il ne voterait pas pour moi, ce qui ne m'avait pas empêché de gagner l'élection », a réagi de son côté Nicolas Sarkozy, vendredi 4 mai sur Europe 1, qui a du mal à accepter cette « mauvaise surprise » qu’il juge comme étant un choix d'« incohérence ». « L'essentiel » c'est que « la quasi-totalité des élus qui soutiennent François Bayrou m'ont rejoint, je les en remercie, pour le reste chacun est libre d'exprimer le vote de son choix », a-t-il lancé. Avant de conclure : « je ne pense pas que ça ait une plus grande importance que cela, la seule chose qui compte c'est 40 millions de Français dimanche prochain ». Dans la majorité, on est sous le coup de massue d’une décision « incompréhensible ». Jean-François Copé, Secrétaire général de l'UMP, dit ainsi regretter « profondément la décision de François Bayrou. Je pense qu'elle est plus motivée par un dépit personnel que par des vraies raisons de fond ».
Du côté des éditorialistes, on ne cache pas sa surprise et on estime que cette décision constitue un « séisme » politique, un « coup de théâtre » ou encore un « coup d’assommoir » à trois jours du second tour.
Crédit photo : AFP
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