"Je ne comprends pas comment Elisabeth Borne a pu accepter une telle régression". L'ancienne ministre des Droits des femmes, la sénatrice PS Laurence Rossignol, est vent debout suite au remaniement ministériel de ce lundi 4 juillet. Et il y a de quoi tant les chiffres sont éloquents. Car si la parité de ce gouvernement "Borne 2" semble respectée en apparence, avec 21 hommes et 21 femmes (Elisabeth Borne incluse), le nombre de femmes ministres de plein exercice régresse à 5 (elles étaient 8 auparavant) contre 11 hommes. Par ailleurs, on compte 9 hommes et 6 femmes ministres délégué·es et enfin 1 homme pour... 9 femmes secrétaires d'Etat.
Une surreprésentation féminine grossière aux postes de secrétaires d'Etat, qui laisse à penser que les femmes sont reléguées au second plan, en bas de l'échelle protocolaire, alors que les ministères régaliens sont squattés par des hommes (Gérald Darmanin à l'Intérieur, Bruno Le Maire à l'Economie, Eric Dupond-Moretti à la Justice, Sébastien Lecornu aux Armées).
"Emmanuel Macron fait un recul qui est inquiétant", tempête Laurence Rossignol qui a ironisé dès hier sur Twitter : "Le féminin de ministre? Bah c'est secrétaire d'Etat, non ? J'ai bon ?"
Depuis l'annonce de la composition de ce nouveau gouvernement, la vice-présidente du Sénat ne décolère pas. "Ce n'est pas parce qu'on a une femme Première ministre que cela justifie que les femmes régressent dans les postes de responsabilités", poursuit-elle sur FranceInfo ce 5 juillet. "Je n'ai jamais entendu qui que ce soit expliquer que comme on avait un homme Premier ministre, on allait avoir 70% de femmes au conseil des ministres pour compenser."
Tout juste nommé porte-parole du gouvernement (en lieu et place d'une femme, Olivia Grégoire), l'ancien ministre de la Santé Olivier Véran a tenté d'éteindre les critiques et de justifier cette parité en trompe-l'oeil.
"Vous avez 21 femmes sur 42 membres du gouvernement, ne regardez pas le positionnement des différents portefeuilles", a-t-il rétorqué à l'issue du premier conseil des ministres ce lundi. "Ce qui compte, c'est la mission pour laquelle vous avez été nommé au gouvernement, et aucune mission n'est moins importante qu'une autre, donc oui ce gouvernement est paritaire."
Pas de quoi convaincre le Haut Conseil à l'Egalité (HCE), qui juge sévèrement la composition de ce nouveau gouvernement.
"Malgré la nomination d'Elisabeth Borne en tant que Première ministre, engagement fort que le HCE tient à saluer, le nouveau gouvernement n'échappe pas à une parité de façade. Si l'on compte une parité stricte (21 femmes et 21 hommes) au sein du nouveau gouvernement, la répartition des ministères répond, dans la continuité des précédents gouvernements, à des biais de genre et à des stéréotypes de sexe : 4 hommes sont à la tête des 5 ministères régaliens, 7 femmes des 9 ministères sociaux (santé, culture, famille, enfance, handicap, jeunesse...)", dénonce-t-il dans un communiqué publié ce 4 juillet.
"Même répartition à l'Assemblée nationale, puisque derrière la présidence féminine incarnée par Yaël Braun-Pivet, on constate pour la première fois depuis 1988 un recul de la place des femmes, qui occupent désormais à peine plus d'un tiers (37,3%) des sièges."
Une parité de façade donc, qui tombe bien mal, alors qu'Emmanuel Macron a annoncé vouloir faire de nouveau de l'égalité entre les femmes et les hommes la "grande cause du quinquennat". De belles promesses que le président peine à traduire dans les faits. L'exemplarité ? Ce n'est pas encore pour aujourd'hui.