Médor est gentil, Médor est mignon. Médor est votre bichon maltais adoré. Vous l'aimez d'ailleurs tellement que vous lui avez récemment créé son propre compte Instagram baptisé @medor_is_bae, sur lequel vous affichez son adorable petite tête velue dans toutes les situations. Au parc, à la plage, sur les genoux de votre mère, affublé d'un costume de Père Noël. Les likes pleuvent et les emojis coeur, aussi. Un véritable succès digital qui vous donne du baume au coeur ; vous le vivez par procuration.
Seulement voilà, il y a un risque beaucoup plus nocif que ce que vous pensez à agir de la sorte. Déjà celui de finir par gonfler vos potes à force qu'ils et elles se tapent dix clichés de langue pendue par jour, et surtout car ce comportement en apparence anodin vous exposerait davantage au risque de fraude.
Une enquête menée auprès de 2000 personnes par One Poll, commanditée par la banque britannique Santander, a ainsi révélé que 40 % des moins de 25 ans sont influencé·es par ce que les stars postent en ligne, tandis que 78 % avouent ne pas savoir comment se protéger contre le vol d'identité. Un cocktail explosif qui connaît des dérives. Elles mettent des photos de leur chat sur leurs réseaux sociaux : nous aussi. Elles donnent leur nom, leur adresse, leur numéro de carte bancaire : nous (pas tous·tes, mais quand même) aussi.
Vous nous pensez alarmistes, mais il y a peu de temps, l'acteur anglais Dean Gaffney avait gracieusement offert une vue plongeante sur ses coordonnées bancaires en partageant un cliché sur lequel les numéros de sa carte bleue étaient largement visibles. C'est seulement lorsque les internautes ont signalé son imprudence (pour ne pas dire connerie), qu'il a retiré le contenu.
Les résultats de l'étude interviennent alors que nous sommes de plus en plus nombreux à être victimes d'escroqueries en ligne, le Cifas (service de prévention des fraudes britannique) signalant une augmentation de 26 % des cas de jeunes de moins de 21 ans en 2018.
Mais alors, quel est le rapport entre les animaux de compagnie et nos économies ? La réponse est plutôt simple : nos mots de passe. Si certain·es d'entre nous ont déjà pris leurs précautions en complexifiant leurs identifiants, beaucoup (un dixième selon le sondage) continuent d'utiliser le nom de leur chien, de leur chat ou de leur lapin angora nain pour accéder à des données très perso. Et postent ensuite cette clé en ligne sous la forme de photo du précieux animal, sur une plateforme public, sans se faire le lien ni se douter du danger. "Un paradis pour les fraudeurs", assure Jodie Cook, experte en réseaux sociaux, au Telegraph.
Selon elle, il est essentiel de ne pas révéler trop d'informations personnelles sur Internet : "Ne divulguez pas votre date de naissance, ne divulguez pas trop le nom de votre animal de compagnie, évitez de donner des détails de famille comme votre deuxième prénom ou le nom de jeune fille de votre mère, ne divulguez pas de souvenirs privés comme votre lieu de naissance et assurez-vous qu'aucun document sensible n'est en vue lorsque vous affichez des photos en ligne."
Le plus étonnant dans l'histoire, c'est encore qu'on ait besoin d'être averti·es de ne pas partager tout ça avec la Terre entière. Ah, sacrés millenials que nous sommes.
L'autre initiative intéressante serait sans doute de ne pas choisir le premier nom qui nous passe par la tête pour configurer notre mot de passe. D'essayer de complexifier la chose. Et de changer nos paramètres de confidentialité, aussi. Ça ne peut pas nous faire de mal de faire du tri dans le flot de personnes qui peuvent épier notre vie.