"Le masculin fait le neutre !"
Cela, ce sont les mots d'Emmanuel Macron. Le président de la République s'est exprimé à propos d'un sujet qui fâche : l'écriture inclusive. Bien des militantes féministes voient là, à travers l'usage du point médian par exemple, une manière de défendre l'égalité des sexes et la féminisation de la langue. Mais Emmanuel Macron ne semble pas vraiment convaincu.
Il a déclaré ce 30 octobre : "Le masculin fait le neutre, on n'a pas besoin d'ajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre lisible. La langue française forge la nation"
Des mots prononcées alors que le Sénat a adopté le 25 octobre en commission une proposition de loi afin d'interdire l'écriture inclusive. Et ce à travers un texte défendu par la sénatrice LR Pascale Gruny. L'idée plus précisément étant "d'étendre les restrictions déjà mises en place ces dernières années par les pouvoirs publics" concernant cette écriture, usage à déconseiller "pour des raisons d'intelligibilité et de clarté de la norme".
Mais Sandrine Rousseau n'est pas d'accord...
L'écriture inclusive n'est pas à prendre à la légère.
Bien des voix engagées en débattent. Comme la professeure Eliane Viennot. Dans nos pages, Raphaël Haddad, fondateur de l'agence Mots-Clés, nous expliquait par exemple que l''écriture inclusive "est un levier efficace pour faire progresser l'égalité femmes / hommes en changeant notre manière d'écrire, et vient déconstruire tous les mécanismes du sexisme ordinaire, qui dilue les effets des lois et des réglementations".
Ce sont tous ces enjeux d'égalité qui titillent Sandrine Rousseau.
En réponse à Emmanuel Macron, l'élue écoféministe affirme ainsi : "Le masculin n'a rien de neutre. C'est pourtant pas compliqué". Si pour le Président "il ne faut pas céder à l'air du temps", il semblerait que Sandrine Rousseau envisage la langue comme un objet, forcément politique, qui n'a jamais été neutre. Et pour cause, pourrait-on suggérer, puisque c'est toujours le masculin qui l'emporte. Pourquoi ?
Parmi les voix des linguistes et des féministes sur Twitter, on relèvera quelques réactions critiques : "Pourquoi commencer ses discours par "Françaises, Français" si le masculin fait le neutre ?", ironise Laélia Véron, que l'on peut écouter sur les ondes d'Inter. La journaliste Hélène Devynck quant à elle note : "L'académie française a été crée pour la langue du pouvoir, celle où le masculin l'emporte sur le féminin, où les accords de proximité sont interdits"
Et ce alors que beaucoup, dans les commentaires du discours relayé par BFM TV par exemple, abondent plutôt dans le sens du discours initial et ne goûtent guère à l'inclusif : "Emmanuel Macron a raison ! La langue française est déjà assez compliquée. Pourquoi remettre une couche ?", "Celles et ceux qui l'utilisent se moquent des Françaises et des Français !", "Je suis totalement d'accord", "Le masculin fait le neutre", peut-on lire.
Un sujet qui divise, donc.
Et si on rappelait les mots de l'historienne Eliane Viennot ?
A TV5 Monde, elle rappelle : "Le masculin générique n'a pas toujours existé. Et surtout ça dépend de qui on parle, des époques. Autrefois, quand on parlait de la politique ou des étudiants, on ne parlait que des hommes puisqu'il n'y avait que des hommes qui faisaient de la politique et qui pouvaient étudier !"
"De fait la langue française a été masculinisée pour accompagner la domination masculine dans une époque où rien n'était égal, le droit était inégal, les coutumes étaient inégales... L'écriture inclusive, c'est un nouveau mot pour quelque chose qui est plus ancien, qui est le langage non sexiste, le langage égalitaire, paritaire"
"C'est un effort qu'on observe dans tous les pays. Cela ne prend pas la même forme en anglais, espagnol, russe, roumain ou français mais c'est la même idée qui est derrière, et qui est appelée de différentes façons. En général, "non sexiste" c'était ce qui était le plus répandu, mais maintenant on a "inclusif" qui est équivalent."