Et oui, car c'est la millénaire City University de Londres qui nous l'apprend dans le cadre d'une enquête prenant en compte 40 000 ménages : les citoyens britanniques seraient plus heureux quand leurs compagnes gagnent... moins qu'eux. A l'inverse, leur moral serait au plus bas quand la dimension salariale ne joue pas en leur faveur. Focalisée sur l'indice d'écart de rémunération entre les partenaires, l'étude nous explique que les hommes interrogés associent davantage leur niveau de satisfaction dans la vie à celui de leur rémunération.
A l'inverse, l'écart entre leur rémunération et celle de leur conjoint n'aurait "aucune incidence" directe sur le niveau de satisfaction des citoyennes sondées dans le cadre de cette recherche. Ce que l'on retient avant tout, c'est évidemment la réalité d'une forme de jalousie systématique des hommes à l'égard de la question salariale lorsqu'elle semble aller à l'encontre de leurs préjugés de genre. Une perception qui ne serait donc pas sans conséquences sur leur "bien-être psychologique", comme le souligne l'enquête universitaire. Allons bon !
Superviseure de cette étude sociologique, la Dr Vanessa Gash voit carrément là la preuve du poids de "normes sexospécifiques", indissociables des identités et constructions de genre. C'est pour cela que, même à l'ère des nouvelles révolutions féministes, les hommes associent cette infériorité salariale à une véritable "souffrance".
Le truc, c'est que les "normes" de genre ont bon dos lorsque l'on aborde la problématique majeure des inégalités salariales. En Angleterre (pays au coeur de l'étude), on estime effectivement qu'un homme gagnerait en moyenne 12 % de plus qu'une femme, selon un rapport de 2018 focalisé sur plus de 10 000 entreprises. Rappelons qu'en France, les femmes gagnent 30% de moins que les hommes, c'est-à-dire 85 centimes pour chaque euro remporté par leurs collègues masculins, comme l'énonce l'économiste et activiste Rebecca Amsellem.
D'où la dimension plutôt comique de ce désarroi masculin, surtout lorsque l'on sait que les estimations ne s'arrangent vraiment pas avec la crise. Ainsi à l'heure de la pandémie mondiale, Le Monde, s'appuyant sur les chiffres d'Eurostat (l'autorité première de la Commission européenne chargée de l'information statistique), pencherait plutôt pour un écart salarial entre les genres de 19,8 % observé au Royaume-Uni. Ca fait mal.
Une réalité déplorable quand l'on se penche sur les conséquences psychologiques et pragmatiques de ces inégalités professionnelles. Par exemple ? La dévalorisation systémique des salariées, la banalisation du "syndrome de l'imposteure", et par-là même la réticence qu'éprouvent les femmes à demander une augmentation ou une promotion. Une lutte pour l'égalité des sexes un brin moins anecdotique que ces "male tears".