Le Tribunal de Toulouse a confirmé son changement de sexe à l'état civil le vendredi 9 avril : Jennifer (prénom modifié, ndlr) pourra donc bel et bien être incarcérée dans le quartier des femmes.
Un transfert qui fait suite à des mois de mauvais traitements dans la maison d'arrêt de Seysses, où la détenue transgenre a subi multiples "actes et propos transphobes de la part de nombreux surveillants" depuis son arrivée juin 2020, dénonce auprès de l'Agence France-Presse Grisélidis, l'association locale de défense des travailleur·se·s du sexe.
Elle était notamment contrainte de porter des vêtements d'homme, et plus récemment placée en quartier d'isolement en attendant le verdict "pour éviter qu'elle ne se fasse agresser par ses camarades", indique la Dépêche du Midi. Une "victoire" donc, qui ne met cependant pas un terme aux inquiétudes des activistes LGBTQ+.
"Ce ne sera pas forcément plus simple pour elle dans le quartier des femmes", estime à l'AFP Laura Garnier, secrétaire de l'association LGBT Arc-en-Ciel Toulouse. "La reconnaissance en milieu carcéral de notre identité de genre est longue et fastidieuse", précise-t-elle. "Déjà qu'il y a beaucoup de violence en prison, imaginez ce que peut endurer une femme trans."
Du côté du syndicat des surveillants, certaines voix s'élèvent contre le "problème" posé "au niveau des fouilles". "On demande à des surveillantes de fouiller une détenue qui a des attributs d'homme", détaille le responsable du Syndicat pénitentiaire des surveillants (SPS) à la maison d'arrêt de Seysses, insistant sur le fait que "la loi dit que cela doit se faire entre personnes de même sexe".
Pour se faire entendre, l'organisation s'est adressée au procureur de la République de Toulouse, et demande à ce que Jennifer soit plutôt transférée au quartier transgenre de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis. Des préoccupations qui témoignent du manque de formation sur le sujet auprès des personnels de terrain, analyse de son côté Têtu.
Le site d'infos LGBTQ+ rappelle également qu'en mai 2019, plusieurs associations sonnaient l'alarme contre la transphobie en milieu carcéral, révélant qu'au "motif de leur sécurité - sans que leur avis sur la question ne soit interrogé - on les enferme à l'isolement : elles ne peuvent croiser aucun autre détenu. Elles n'ont donc pas accès à la cour de promenade, mais uniquement à une salle d'une quinzaine de mètres carrés, dont le plafond est remplacé par d'épais grillages."
En octobre 2020, la ministre déléguée chargée de l'Egalité femmes-hommes et de la diversité Elisabeth Moreno annonçait son Plan national d'actions pour l'égalité contre la haine et les discriminations anti-LGBT, lequel prévoyait de "mieux protéger les personnes LGBT+ incarcérées".
A voir comment ces promesses se traduisent concrètement.