Cinq fois plus élevé que la moyenne mondiale. Vous pouvez vous frotter les yeux, ce n'est pas un cauchemar : c'est à cela que correspond le taux de violences faites aux femmes en Afrique du Sud. Ce chiffre cinglant, c'est Amnesty International qui nous le décoche, comme le détaille le site d'informations RFI Afrique. "L'application des lois n'est pas suffisante dans le pays, car beaucoup trop de femmes sont encore victimes de violences dans l'espace public, ou chez elles", déplore Kumi Naidoo, défenseur des droits de l'homme et secrétaire général de l'organisation non gouvernementale.
Au total, ce sont au moins trois Sud-Africaines qui meurent chaque jour sous les coups de leur mari, et une Sud-Africaine sur cinq qui a déjà été victime de violences physiques, relate Courrier International, qui l'affirme sans davantage tergiverser : cela fait de l'Afrique du Sud l'un des pays les plus dangereux pour les femmes. Ces chiffres nous sont rappelés en plein mois d'août, c'est à dire "le mois de la femme" en Afrique du Sud. A Johannesbourg se tient même un rassemblement organisé par Amnesty et destiné à sensibiliser la population - et le monde - à cette réalité assourdissante.
Ce "mois de la femme", célébré sur les réseaux sociaux sous l'étendard #WomensMonth, tend à valoriser les luttes des citoyennes sud-africaines au sein d'un pays encore hanté par son passé. Ainsi, tout en mettant en avant les voix féminines d'aujourd'hui, ravive-t-on sur Twitter les mots du regretté Nelson Mandela : "Je rends hommage aux mères, aux épouses et aux soeurs de notre pays. Vous êtes le fondement de notre lutte. L'apartheid vous a infligé plus de souffrances que quiconque". Le 9 août 1956, sous l'égide de la Fédération des femmes d'Afrique du Sud, les citoyennes étaient entre 10 000 et 20 000 à manifester dans la rue contre ces lois discriminatoires.
"En tant que femme vivant en Afrique du Sud, les probabilités que vous soyez abusée, violée, violentée, sont tellement élevées, que l'on vit tout le temps dans la peur, on en a toujours conscience", a déclaré à RFI la poétesse Puno Selesho. Et pour cause. Il y a quelques mois encore, comme l'attestait une vidéo mise en ligne sur son compte Instagram, la chanteuse sud-africaine Babes Wodumo se faisait agresser par son conjoint. Des images qui ont suscité l'indignation, dont celle du ministre de la Culture Nathi Mthethwa. "Le gouvernement sud-africain ne tolérera jamais les violences basées sur le genre. Nous appelons tous les Sud-Africains à lutter et mettre un terme à ces violences", a-t-il alors déclaré. C'était en mars dernier. De quoi rappeler la révolte qu'avaient provoqué le viol et l'assassinat de trois femmes en mai 2017. Leurs corps avaient été retrouvés à Soweto, au sud-ouest de Johannesburg. Et malgré la colère, rien ne semble avoir vraiment changé depuis.
Et ce au grand dam de la ministre de la sécurité d'Etat Ayanda Dlodlo. Sur Twitter, elle appuie sa position et en appelle à un changement massif. "Nous devons redoubler d'efforts pour protéger et promouvoir les intérêts des femmes dans les salles de conseil, les salles d'audience, à la maison, dans les écoles, dans les fermes et dans tous les autres espaces de la société", assure-t-elle. Espérons que cette assertion ne soit pas qu'une parole en l'air. En tout cas, pour la politicienne sud-africaine, une chose est sûre : "aucun pays ne peut être réellement libre sans l'émancipation totale des femmes".