"J'ai subi deux agressions sexuelles. Et je n'ai jamais porté plainte..."
Ces mots sont ceux d'une femme tantôt grave, tantôt drôle, toujours engagée : l'humoriste Caroline Vigneaux. Dans son nouveau spectacle, seule en scène à découvrir au Grand Rex du 20 au 22 mars, puis dans le reste de la France, la comédienne, également connue pour son passé d'avocate, met en mots les violences sexuelles dont elle a été victime.
Elle en parole, aussi, à nos confrères de franceinfo cette semaine : "J'ai subi deux agressions sexuelles complètement aléatoires. Dans la rue, et un viol par quelqu'un que je connaissais. Et je n'ai jamais porté plainte...". Ce viol a eu lieu en 2001. Caroline Vigneaux a 26 ans seulement à l'époque. Le meilleur ami de son ex s'invite chez elle simplement "pour dormir". Mais durant la nuit, l'humoriste sera réveillée par cet "ami".... se rendant compte que celui-ci en train de la violer.
Caroline Vigneaux n'a pas porté plainte, par peur, par honte, subissant les conséquences pernicieuses du le victim blaming - cette constante remise en question de la parole des victimes, suscitant l'inversion de la culpabilité victime/agresseur - et pour d'autres raisons, qu'elle détaille au média en ligne : "... Alors que je suis avocate, que je suis une femme forte et je n'ai pas trouvé le courage d'affronter ce qu’affrontent les femmes qui vont porter plainte. À savoir, la justice, le pourquoi, les questions..."
"Moi, j'avais qu'une seule envie, c'était de prendre une douche"
Mais aujourd'hui, l'artiste parle. Et à beaucoup à dire...
"Avant ce viol, je me suis dit, c'est un ami, alors pourquoi je serais en danger ?"
"... Et quand ça s'est produit, et bien... Je ne bouge pas, ne crie pas. J'étais tétanisée...", avait l'an dernier déjà détaillé l'humoriste dans les pages de La Tribune dimanche. C'est ce que l'on appelle la sidération. Un phénomène bien connu des victimes d'agressions sexuelles. "Une fois terminé, il s'est rhabillé, puis est parti... Je n'en ai pas parlé car je n'avais pas envie qu'on me colle une étiquette, qu'on me regarde différemment. J'ai décidé de vivre avec. J'ai mis cette agression sexuelle dans une petite boîte bien fermée à clé dans ma tête. Je ne voulais plus l'ouvrir"
Celle qui est connue pour ses performances déchaînées sur scène, son passé d'avocate, mais aussi, ses prises de position ouvertement féministes, a un puissant message à faire passer, auprès de ce violeur, mais pas seulement, alors que son nouveau spectacle s'invite au Grand Rex.
Caroline Vigneaux explique à franceinfo pourquoi elle parle de cela sur scène, et se permet d'interpeller directement les auteurs de violences sexuelles : "Je vais en faire rire de ces agressions sexuelles, dans mon spectacle pour laisser un message fort qui est : ça ne nous détermine pas. Et laisser un message aux agresseurs : malgré ça, on va continuer à rire, vous n'allez pas foutre complètement notre vie en l'air !"
Une manière pour elle de parler, pour toutes celles qui ne l'osent, ou ne le peuvent pas.
D'aller à l'encontre de la culture du viol, également : cette expression fondamentale des mouvements féministes, ici décryptée par Sandrine Rousseau, qui désigne l'euphémisation dans notre société des violences sexuelles, leur romantisation, et la négation du consentement.
"Car jusqu'à MeToo, je pensais encore que j'étais responsable de mon viol, que je n'avais pas respectée telle ou telle règle, de ne pas m'habiller comme ça, etc... Aujourd'hui je dis que je suis féministe, et que je vais parler des violences sexuelles dans un lieu qui est mon lieu, mon spectacle", détaille à nos confrères de franceinfo Caroline Vigneaux.
Une parole intime et politique.