Pour entrer dans le temple hindou de Sabarimala, il n'est pas bon d'être une femme. Menstruées ou non, les femmes âgées de 10 à 50 ans n'y sont tout simplement pas admises. Récemment, le président du conseil d'administration du temple, Prayar Gopalakrishnan, a même déclaré qu'il lèverait cette interdiction à condition qu'une "machine" pouvant détecter si une femme a ses règles était inventée. Même s'il affirme que ses propos étaient sortis de leur contexte, l'homme maintient l'interdiction des femmes à entrer dans le temple.
Suite à ces déclarations abjectes, une étudiante indienne, Nikita Azad, a décidé de lancer la campagne #HappyToBleed ("Heureuse de saigner"). Sur Twitter et Facebook, elles ont été nombreuses à poster des photos d'elles-mêmes brandissant serviettes hygiéniques et pancartes, pour lutter contre le tabou autour des règles.
La jeune étudiante de 20 ans a également écrit une lettre ouverte à Gopalakrishnan où elle dénonce ces "coutumes rétrogrades, barbares et misogynes" et appelle l'État à prendre ses responsabilités en proposant aux femmes des soins menstruels. Pour Nikita, ainsi que pour des millions d'autres femmes indiennes, avoir ses règles ressemble davantage à une lutte pour sa dignité qu'à un cycle naturel. Si la campagne a attiré des milliers de partisans, d'autres se sont montrés plus difficiles à convaincre. "Il y a des gens qui nous ont appelés putes", raconte-elle. Ce qui n'empêche pas Azad de clamer haut et fort : "Nous saignons. Acceptez-le."
Le tabou qui entoure les règles en Inde a des conséquences dramatiques. Près d'une écolière sur cinq abandonne l'école dès que leur cycle commence et ce sont 70% des femmes qui n'ont pas accès à des produits sanitaires. Plus accablant encore, dès l'arrivée de leurs règles, les femmes ont interdiction de toucher des aliments ou même d'entrer dans la cuisine. Elles sont même contraintes à utiliser des assiettes et des couverts qu'elles seules peuvent toucher.
Même si sa campagne #HappyToBleed s'est terminée le 4 décembre, Nikita entend bien continuer à faire entendre sa voix. La jeune militante espère pouvoir bientôt présenter son programme au ministère de la Santé en Inde. Alors, à quand un réel changement des mentalités ?