Depuis une semaine, une image fait le tour des réseaux sociaux. Il s'agit de celle de Jahantab Amadi, une jeune femme afghane qui a passé un examen d'entrée pour intégrer une université, par terre, assise en tailleur en tenant son bébé contre elle. Un tableau singulier qui n'a pas échappé à Nasir Khusraw, professeur de l'université privée, lieu où se déroulait l'examen.
Après l'avoir photographiée, l'enseignant a publié l'image sur sa page Facebook le 19 mars, soit trois jours après l'examen. Absorbée dans sa copie, Jahantab Amadi ne se doute de rien. Plus tard, elle reçoit plusieurs messages de ses amis : "Mes amis au village m'ont dit : 'Tu as été photographiée.' Je leur ai dit : 'Comment ai-je pu ne pas savoir qu'on me photographiait ?' Et ils m'ont répondu : 'Tu étais concentrée sur l'examen", a-t-elle raconté à l'Agence France-Presse (AFP).
Originaire d'un village situé dans la province de Daykundi, en Afghanistan, la femme est âgée de 25 ans. Cette mère de trois enfants rêve de devenir doctoresse, "pour servir les femmes de ma communauté ou de sa société", précise-t-elle à l'AFP. Pour se rendre à Nili, capitale de la province de Daikundi où avait lieu l'examen, Jahantab Amadi a dû marcher deux heures dans les montagnes, puis effectuer un trajet de plusieurs heures dans les transports en commun.
Si la jeune femme a passé une partie de son examen par terre, c'est parce que sa petite fille âgée de quelques mois souffrait d'une douleur à l'oreille et n'arrêtait pas de crier. Sa maman s'est donc mise à l'écart afin de ne pas déranger les autres candidats. "Je devais me concentrer sur le bébé et passer le test", explique Jahantab Amadi à l'AFP.
Le courage et la volonté de cette jeune femme ont ému le pays entier. Jahantab Amadi doit d'ailleurs une fière chandelle au professeur qui l'a photographiée, puisque son histoire a incité l'Association de la jeunesse afghane a lancé une campagne de financement qui a permis de récolter la somme de 14 000 dollars, soit une véritable fortune dans ce pays massivement touché par la pauvreté où le PIB par habitant s'élevait à 617 dollars en 2016.
Zahra Yagana, célèbre défenseuse des droits des femmes, a elle aussi été touchée par le combat de Janahatab Amadi, jusqu'à lui proposer de l'aider à intégrer une université de Kaboul, (capitale de l'Afghanistan) et de l'héberger ainsi que son mari et ses trois enfants. "Si elle devait étudier au Daikundi, ce serait dur pour elle", a précisé la militante à l'AFP. Là-bas, le niveau d'éducation est bas. Il n'y a pas de résidence universitaire et elle devrait vivre dans une location", développe-t-elle.
Une chance inespérée pour Jahantab Ahmadi qui rêvait de reprendre ses études depuis qu'elle a fini le lycée à l'âge de 18 ans. "Du fait de notre pauvreté, je n'ai pas pu me permettre d'étudier pendant trois ou quatre ans", déplore-t-elle.
Selon des chiffres d'Oxfam, association de développement qui lutte contre les injustices et la pauvreté, 6% de femmes afghanes âgées de 25 ans ou plus ont reçu une éducation formelle. Ce faible accès à l'éducation se traduit par un taux d'analphabétisme très important (l'un des plus élevés au monde). En effet, Oxfam indique que seules des 12% des afghanes âgées de 15 ans ou plus savent lire et écrire. Quant aux filles scolarisées en Afghanistan, le pourcentage s'élève à seulement 28 %, selon des données 2011 de l'ONG Save the Children.