L'égalité viendra (entre autres) par le sport. Nous sommes nombreux·ses à le penser. C'est ce que pense également la joueuse Ada Hegerberg, Ballon d'or féminin 2018, le premier de l'histoire.
La soirée de remise du prix qui s'est déroulée à Paris le 3 décembre aurait pu être encore plus parfaite si le musicien Martin Solveig n'avait pas demandé à Ada Hegerberg de "twerker" après avoir gagné le prix. Un moment sexiste qui n'avait pas manqué de faire réagir.
Dans une tribune publiée sur le site The Players Tribune, intitulée "Pas là pour dancer", Ada Hegerberg réplique. La championne explique avoir grandi dans une petite ville de 7000 habitant·es en Norvège. La première à jouer au football, c'était sa soeur, capitaine d'une équipe composée de garçons. Et le coach, c'était leur mère.
Ada Hegeberg raconte : "Il y avait un véritable sentiment d'égalité. Personne n'a discuté le fait que ma soeur soit capitaine ou que ma mère soit entraîneur."
Elle lance un message fort aux filles qui veulent la suivre sur le même chemin du football de haut niveau : "La seule chose que je dirais à une fille qui lit ceci en ce moment, c'est : 'Tu ne peux laisser personne t'enlever ta flamme. Si tu as de grands rêves, cette flamme est la seule chose qui t'y mènera."
Ada Hegeberg les prévient : elles vont en baver pour y arriver. "Le talent seul ne suffira pas. La patience ne suffira pas. Tu vas être testée et poussée à la limite de ce que tu peux supporter. Tu devras travailler aussi fort que les hommes pour atteindre le sommet de ton sport, mais pour beaucoup moins d'argent. Tu vas pleurer. Tu vas vomir. Tu vas avoir mal."
L'équipe de l'Olympique Lyonnais a été l'une des premières à développer des efforts financiers pour mettre en place une équipe féminine de football. Ada Hegerberg, qui a intégré la team, applaudit.
Elle explique que les femmes de l'OL jouent ainsi sur un pied d'égalité avec les hommes : "[Ils] sont traités comme nos collègues. C'est aussi simple que ça. N'est-ce pas comme ça que ça devrait être partout ? Chaque joueuse mérite la même opportunité de se développer. Il y a tellement de talents partout dans le monde qui méritent une chance de briller."
Ce qui compte le plus pour celle qui pourrait "parler pendant des heures de l'égalité et de ce qui doit changer dans le football et dans la société en général", c'est le "respect" : "Nous travaillons aussi dur que n'importe quel footballeur, point final. Nous vivons les mêmes expériences et les mêmes déchirements. Nous faisons les mêmes sacrifices. Nous laissons nos familles derrière nous pour poursuivre nos rêves, nous aussi."
La championne qui vient de gagner le premier Ballon d'or féminin dispose maintenant d'un porte-voix puissant pour être entendue. Alors elle lance alors un message fort à toutes les fédérations de football : "Les fédérations de football, vous m'écoutez ? Nous pouvons faire mieux. Lorsque vous obtenez des investissements de classe mondiale, vous obtenez des résultats de classe mondiale."
Après tant de sacrifices, Ada Hegerberg n'allait pas se faire "ruiner" sa cérémonie de remise de Ballon d'or, ce "beau moment", par "une blague stupide d'un présentateur". Le DJ Martin Solveig lui a en effet demandé de twerker après qu'elle ait gagné la récompense suprême. A la surprise générale.
Pour conclure sa tribune, la footballeuse revient sur la fin de cette folle soirée, dans un restaurant iranien près des Champs-Élysées. Au moment où elle entre dans l'établissement, il est vide à l'exception d'un chanteur iranien.
Elle finit par tacler Martin Solveig en racontant l'épilogue de ce dîner : "Donc, non, je suis désolée de le dire, je ne peux pas twerker. Mais si vous me surprenez le bon soir et que je me sens bien, et que vous mettez en route la chanson pop iranienne parfaite... Je peux chanter de tout mon coeur."
Mais surtout : "Et je peux aussi jouer au football."