Le ministre du Logement Julien Denormandie le déclarait encore en mars dernier : "La solidarité ne doit pas être victime du Covid-19". Et pourtant, après plus de quatre semaines de confinement placées sous le signe du "Restez chez vous" et la mise en place d'initiatives en France (le logement au sein des chambres d'hôtels par exemple), bien trop d'hommes et de femmes sans abri sont encore dans la rue, risquant - entre autres - d'être infectés par le coronavirus.
Car le confinement exacerbe les violences et discriminations, mais également les inégalités. L'espace d'un communiqué officiel, le Collectif des associations unies (regroupant entre autres la Fondation Abbé Pierre, France Terre d'Asile, la Croix-Rouge française, Emmaüs ou encore ATD Quart Monde) rappelle l'existence de tous ces "oubliés du confinement" que sont les personnes sans-abri et mal-logées. Entre distributions alimentaires et accueils perturbés, absence de personnels bénévoles, manque de moyens pour respecter les mesures sanitaires, accès aux soins très limités... Après toutes ces semaines d'isolement, la situation a-t-elle vraiment évolué ?
"Beaucoup reste à faire", répond d'emblée le Collectif. Ce qui signifie également que les associations et les pouvoirs publics ne sont pas restés inactifs depuis le début du confinement, loin de là. Ces dernières semaines, 9 000 places d'hébergement ont été effectivement créées en urgence, et 80 Centres d'hébergement spécialisés ont ouvert leurs portes afin d'accueillir les malades. Des grandes villes comme Paris ont également sensibilisé l'opinion publique et exigé de l'Etat qu'il "équipe en matériel de protection les bénévoles et salariés des associations humanitaires qui viennent en aide aux sans-abri", tel que le déclarait en mars dernier la maire Anne Hidalgo.
Mais hélas ça ne suffit pas, et loin de là, déplorent les associations du collectif : "Des milliers de personnes sont encore à la rue !". Les numéros d'urgence (comme le 115) sont saturés et les solutions d'hébergement "rarement adaptées" aux mesures sanitaires et à la distanciation sociale, notamment l'hébergement au sein des gymnases et le co-hébergement bien trop fréquent fort au sein des hôtels (jusqu'à trois personnes par chambre). De plus, l'attention gouvernementale accordée aux personnes mal-logées est encore bien trop minime.
A savoir, celles et ceux qui vivent dans des bidonvilles, des squats ou des foyers de travailleurs migrants, et qui, "déjà très fragilisées par des années de précarité et d'expulsions", se retrouvent sans moyens à leur disposition pour respecter les gestes-barrières et éviter autant que faire se peut les risques de contamination. C'est bien simple, de nombreux anonymes dans cette situation n'ont même pas accès à l'eau. Quelle pourrait être la conséquence de ces insuffisances matérielles et sanitaires ? "De nouvelles hécatombes", prévient le communiqué.
Dès lors, comment agir face à cette pauvreté qui n'a pas le luxe d'être confinée ? En réquisitionnant d'autant plus de chambres d'hôtels et de bâtiments vides afin de les loger d'urgence, en fournissant et en garantissant l'accès à des masques et gels hydroalcooliques, en proposant un dépistage prioritaire des personnes les plus exposées et des aides financières exceptionnelles aux plus précaires, propose le communiqué. En somme, en s'assurant que la solidarité, comme l'énonce le Ministre du logement, ne soit effectivement pas "victime du coronavirus".
Et alors que d'aucuns pensent déjà au monde d'après, c'est dès à présent qu'il faut agir, et vite. "L'après-confinement devra permettre des changements profonds. Pour éviter, à chaque crise ou chaque hiver, de bricoler des solutions palliatives en urgence", affirme le Collectif des associations unies. Une évidence.