Depuis début 2000, les chercheurs observent une nette hausse des cas de syndromes du choc toxique (SCT) en France : 5 cas déclarés en 2004, 19 en 2011, jusqu'à 22 cas en 2014 et déjà 17 en 2016.
Le SCT est une infection sanguine, causée par des toxines produites par une bactérie appelée staphylococcus aureus ou staphylocoque doré. Si celle-ci est naturellement présente chez 30 à 40% de la population, au niveau du nez, du rectum, de l'arrière de la gorge et compose 4% de la flore vaginale, elle n'est pas toujours dangereuse, la plupart des personnes développant des anticorps.
Mais, pour les femmes n'ayant pas développé de défenses immunitaires à l'encontre de cette toxine (1% des femmes), le SCT peut être provoqué par le port d'une protection hygiénique. Avec un tampon, le fluide menstruel est "retenu". La bactérie va alors se mettre à produire une toxine (TSST-1), qui va se propager dans le sang. Et les conséquences sont nombreuses autant qu'elles sont néfastes : bouts de nez ou de doigts nécrosés, amputation d'un membre ou la mort.
Malgré tous ces risques, le syndrome du choc toxique reste tabou et les médecins n'y pensent pas forcément lors d'un diagnostic. Pire encore, la déclaration du syndrome du choc toxique n'étant pas obligatoire et encore moins systématique, le centre national de référence doit alors s'en remettre à la bonne volonté des médecins. A condition, là encore, que ces-derniers connaissent cette maladie.
Une situation qui n'est pas sans nous rappeler celle de Lauren Wasser, mannequin américaine. Aujourd'hui âgé de 29 ans, cette jeune femme avait contracté ce syndrome du choc toxique en 2012, à la suite duquel, elle avait dû être amputée d'une jambe.
Cette histoire aura eu un retentissement tel que plusieurs personnes - dont des scientifiques - se sont alors posé la question de la corrélation entre composition des tampons et cette maladie. La Française Mélanie Doerflinger, lanceuse d'alerte, ira même jusqu'à mettre en ligne une pétition pour que soient dévoilés les ingrédients des tampons. Pourtant, certains spécialistes appellent à la prudence face à l'incrimination trop rapide des tampons, faute de données conséquentes - même si la question a tout de même la pertinence d'être soulevée. Plusieurs autres pistes pourraient entrer en compte, comme l'utilisation accrue de protections ou une évolution de la flore vaginale due peut-être à l'alimentation.
Selon le professeur Gérard Lina interviewé par l'Obs, les coupes menstruelles, autant que les tampons, pourraient être responsables de ce syndrome. Et cela, bien qu'elles soient naturelles. La raison est simple : le syndrome du choc toxique est avant tout une réaction au stockage du sang au niveau vaginal. Dans les deux cas, il est important de respecter les consignes d'utilisation mais surtout de ne pas les garder trop longtemps. Mais surtout, en ce qui concerne les cups, de bien les nettoyer.
Et, pourtant boudées par de nombreuses femmes, les serviettes hygiéniques sont quant à elles bien moins néfastes. Effectivement, du fait qu'elles font moins effet de "barrière" au flux sanguin, elles empêchent alors davantage le développement des staphylocoques.
Malheureusement, dans le rayon des protections périodiques, l'éducation se fait sur le tas. Mais il faut savoir qu'il est possible de prévenir le SCT par des gestes simples, au quotidien. Tout d'abord, en ne gardant jamais une protection hygiénique plus de quatre heures. Ensuite, en essayant d'alterner au maximum tampon/cups avec des serviettes - la nuit par exemple. Mais également d'utiliser, dans le cas des tampons, une protection adaptée à notre flux.
Et, si il est traité à temps, ce syndrome peut même se soigner facilement et ne provoquer aucun séquelle dans le futur. Pour ce faire, au moindre symptôme (fièvre soudaine, vomissements, diarrhée, éruption cutanée ressemblant à un coup de soleil ou encore crampes musculaires, entre autres) il est préconisé d'enlever le tampon ou la cup et de consulter immédiatement son médecin.
Si le syndrome du choc toxique ne touche que très peu de femmes, il n'en est pas moins très dangereux et mérite que la science se penche enfin sérieusement sur le sujet. C'est notamment le combat du professeur Gérard Lina, spécialiste à la tête du laboratoire de bactériologie et des mycobactéries au CH Lyon-Sud, qui a décidé de lancer une vaste collecte de tampons usagés. Son but : mieux comprendre ce phénomène en déterminant si la flore vaginale diffère en fonction du type de tampon et si cela influe en faveur d'un choc toxique, ou non. Mais également de voir si la présence de probiotiques peut empêcher la prolifération de staphylocoques.
Pour participer à cette recherche, il suffit d'aller sur le site du CHU de Lyon ou d'écrire à gerard.lina@univ-lyon1.fr pour obtenir un kit. L'intérêt est aussi pour la participante de savoir si elle est porteuse de la bactérie l'exposant à ce risque.