Trois millions : c’est le nombre de personnes diabétiques* que compte actuellement la France. Un chiffre qui a augmenté de 90% au cours de la dernière décennie. Et alors que la deuxième Semaine nationale de prévention du diabète a débuté lundi 3 juin, Gérard Raymond, président de l’Association Française des Diabétiques entend attirer l’attention de la population et des autorités sanitaires sur cette maladie se caractérisant par un taux de sucre trop élevé dans le sang. « 400 nouveaux cas de diabète sont diagnostiqués chaque jour. À ce rythme et si rien n’est fait, un Français sur dix sera touché d’ici dix à quinze ans », prévient-il. Et d’ajouter : « On estime, en outre, à 700 000 le nombre de diabétiques qui s’ignorent. » Car le diabète est une maladie dite « silencieuse » ; son développement peut passer inaperçu pendant de longues années. Cinq à dix ans peuvent ainsi s’écouler entre l’apparition des premières hyperglycémies et le diagnostic du diabète de type 2.
Une réalité que Martial Maury connaît bien. Correspondant de presse et romancier, il est devenu diabétique en 2011, à 45 ans. Dans son Petit Dictionnaire Impertinent du Diabète (Grancher), il compare la maladie à « la Grâce Divine ». « Elle frappe qui elle veut, comme elle veut, quand elle veut. On ne sait pas pourquoi tel en est atteint et pas un autre. Certes, pour le type 2, une prédisposition héréditaire semble être de mise, ce qui confirme l’adage que "l’on est jamais trahi que par les siens". Des excès de table, un manque d’exercice physique, on se laisse aller, on savoure la vie et surtout la gastronomie et paf ! Le diabète déboule sans crier gare et vient tout chambouler. Pour le type 1, il s’agit de l’arrêt de la production d’insuline sans que les sommités médicales en aient décelé les raisons ; une grève sauvage qui surprend tout le monde. »
On distingue en effet deux types de diabète. Le type 1, dont est atteint Martial Maury, est une maladie auto-immune touchant 6% des diabétiques et se caractérisant par une insuffisance ou une absence de fabrication d’insuline par le pancréas. Le type 2, quant à lui, peut se développer sous deux formes : l’insulinopénie (le pancréas fabrique toujours de l’insuline mais en faible quantité par rapport aux taux nécessaire de sucre dans le sang) ou l’insulinorésistance (le pancréas fabrique de l’insuline mais celle-ci agit mal dans l’organisme). Il concerne 92% des malades mais son apparition peut-être prévenue « en soignant son alimentation et son hygiène de vie, en préférant l’escalier à l’ascenseur, en faisant tout simplement attention à soi », explique le romancier.
Quel que soit le type de diabète dont ils sont atteints, les malades doivent s’adapter, changer leur mode de vie et leurs habitudes alimentaires afin de mieux vivre avec la maladie. Au programme : activité physique et régime diététique obligatoire. « Depuis que je suis diabétique, je n’ai jamais mangé autant de betteraves rouges. La culture de la betterave occupe 7 millions d’hectares dans le monde. J’ai l’impression que toute la quantité produite se retrouve dans mon assiette », raconte avec humour Martial Maury, précisant ne plus mettre de « sucre dans [s]on café » et avoir « fait une croix sur la confiture et le chocolat ». Des péchés mignons remplacés par de la compote, entre autres. « Jamais je n’aurais imaginé qu’à 46 ans, j’allais me mettre non seulement à manger de la compote, mais à la cuisiner ! Avant, quand j’étais un quadragénaire normal, je ne mangeais jamais de compote car la compote, c’est pour les enfants et même si je suis jeune d’esprit, il y a des limites à ne pas dépasser », se souvient-il. Autre nouveauté pour ce père de famille : le sport. « Moi, dont la principale activité sportive était de lire le quotidien L’Équipe, me voici contraint de faire du sport et pour de vrai. » Obéissant aux recommandations du corps médical, Martial Maury s’est donc mis à la marche. « J’emmène mon fils à l’école à pied chaque jour et, sur le chemin du retour, je fais un détour afin de rallonger le trajet de 300 à 400 mètres », se félicite-t-il.
Paradoxalement, Martial Maury affirme « mieux » vivre depuis qu’il a été diagnostiqué diabétique. « J’ai une meilleure hygiène de vie. Certes, être contraint de se piquer trois à quatre fois par jour sans espoir de guérison n’a rien de bien réjouissant mais il faut voir le bon côté des choses. Cette maladie n’est pas douloureuse. » Et s’il a d’abord pensé son Petit Dictionnaire Impertinent du diabète comme une démarche personnelle et thérapeutique, afin d’« évacuer » et de s’« approprier » cette maladie qu’il juge « obsédante », Martial Maury veut aujourd’hui en partager sa vision optimiste et dédramatiser. « J’ai du diabète mais suis-je malade ? », interroge-t-il d’ailleurs dans son ouvrage. « Je ne mange plus de sucre, m’interdis les gâteaux, les sucreries, contrôle ma glycémie et me pique 3 à quatre fois par jour. Sur mon corps, je commence à avoir des plaques bleues aux endroits où je me pique. Pourtant, je refuse de me considérer comme malade. Je suis affectueux ! C’est la Sécurité sociale elle-même qui l’affirme. Donc je ne suis pas malade. Pour elle, je suis atteint d’une affection de longue durée et c’est beaucoup plus mignon. »
* Une personne est considérée comme diabétique lorsqu’à jeun, et à deux reprises, son taux de sucre dans le sang est supérieur ou égal à 1,26g/l, ou inférieur ou égal à 2g/l à n’importe quel moment de la journée.
Petit Dictionnaire Impertinent du diabète, éditions Grancher
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