Les chiffres sont édifiants : aux Etats-Unis, un rapport paru dans le Journal of American Sociology of Nephrology montre que la fréquence de don d'un rein "est supérieure de 44 % chez les femmes par rapport aux homme", note Le Monde. En France, selon l'Agence de la biomédecine, elles représentent 62 % des donneur·euses vivant·es de rein.
Comment l'expliquer ? Plusieurs pistes sont évoquées.
"La société s'attend généralement à ce que les femmes soient des donatrices", explique Bethany Foster, médecin spécialisée dans la recherche sur le rein à l'université McGill, au Canada, auprès de la BBC. La raison : elles sont plus habituées à considérer les soins aux membres de leur famille comme une extension de leurs tâches domestiques. Selon plusieurs expert·es, cela pourrait être le principal moteur de cette disparité.
Une étude menée par des anthropologues médicaux en Egypte et au Mexique révèle ainsi que les deux cultures observées associaient la maternité à la volonté de faire un don. "En établissant une analogie résonnante entre l'accouchement et le don d'un rein, le corps de la mère était explicitement considéré comme la source de vie dont on pouvait extraire à la fois des bébés pleinement formés et des organes", indique le rapport.
"Le prélèvement d'un organe supplémentaire de cette même source était considéré comme une continuation organique de cette intimité et interdépendance corporelles." Et donc, une évidence qui ne s'appliquerait pas aux hommes.
En Inde, où les chiffres sont aussi nettement plus importants chez les femmes (70 % des donneur·euses vivant·es sont des Indiennes), la raison d'une telle disparité émane surtout de la pression sociale et des inégalités salariales, analyse le Times of India.
"Si une femme dit non au don d'organes, elle est traitée comme une paria sociale", déplore auprès du média Dr Anil Kumar, chef de service et consultant principal, néphrologue et médecin spécialiste des transplantations au BGS Gleneagles Global Hospital, à Bangalore.
"Elle a du mal à vivre dans la même maison que les autres membres de la famille. En revanche, si l'homme ne souhaite pas faire de don, c'est socialement acceptable. L'explication avancée est que l'homme est le principal soutien de famille et que le don d'organe mettrait sa santé en danger". Cependant, lorsqu'il s'agit de don à titre posthume, la proportion s'inverse : 70 % des donneurs sont des hommes.
L'Agence de la biomédecine nuance toutefois en rappelant que le don passe par des critères de sélection qui peuvent expliquer pourquoi certains volontaires masculins seraient recalés. "Malgré la prédominance de femmes qui donnent, nous ne pouvons pas forcément en déduire, sans étude plus approfondie, que les hommes sont moins candidats au don du vivant", souligne l'organisme français.
"En effet, pour pouvoir être éligible au don, les candidats doivent répondre à des critères de compatibilité médicale, avoir un très bon état de santé, passer devant un comité spécialisé et devant le tribunal de grande instance. Autant d'étapes qui ne relèvent pas que de la 'volonté de donner'". A méditer.