Récemment, le nom d'Abdallah Roshdy a figuré dans les termes les plus recherchés de Google. Et pour cause, le prédicateur islamique a énoncé que si les femmes se faisaient harceler dans la rue, c'était la faute de leurs vêtements. Un victim-blaming en bonne et due forme.
La controverse a commencé lorsque l'imam a implicitement justifié le délit dans une vidéo publiée sur Twitter, en réponse aux rapports sur le violeur en série Ahmed Bassem Zaki, qui a été accusé par une cinquantaine de femmes de crimes sexuels. Il utilise une comparaison douteuse : "Une personne sage conseille à son ami : 'S'il te plaît, ferme ta voiture avant d'aller chez toi, parce que si tu la laisses ouverte, elle pourrait être volée.' Son ami : 'Oh non ? Vous justifiez le vol ?' Apparemment, les esprits ont besoin d'être réactivés !"
Une culpabilisation crasse qui contribue clairement à la culture du viol.
Qu'à cela ne tienne, un jour plus tard, Abdallah Roshdy a réitéré. Dans un message sur sa page Facebook, il a abordé cette fois directement le harcèlement sexuel, en soulignant que l'une de ses principales causes est le fait que les femmes portent des vêtements courts et serrés : "Les causes du crime sont nombreuses, y compris les vêtements courts et serrés qui sont séduisants". Dramatique.
Il poursuit, dans ce qu'on pourrait appeler une tentative (ratée) de se rattraper aux branches : "Ce n'est qu'une des nombreuses raisons, et ce n'est pas la seule. Cela doit être traité comme toute autre raison qui conduit au harcèlement sexuel, mais ces raisons ne permettent ni ne justifient que le harceleur commette son acte".
Ce n'est malheureusement pas la première fois que le prédicateur influent (il compte plus de 143 000 d'abonné·e·s sur Twitter et trois millions de personnes sur Facebook) est à l'origine de propos sexistes et dangereux. Sur le mariage des enfants déjà, il avait estimé qu'il était permis de marier une fillette dès l'âge de neuf ans, mais à condition qu'elle puisse physiquement et psychologiquement supporter le mariage, rapporte le média Egypt Independent.
Devant l'indignation justifiée d'une partie de la population, les autorités locales ont réagi. Le ministre égyptien des dotations religieuses, Mohamed Mokhtar Gomaa, a ainsi décidé lundi 6 juillet de suspendre Abdallah Roshdy de ses fonctions de prédicateur, en attendant les résultats des enquêtes administratives sur ses opinions et ses postes sur les réseaux sociaux. Selon l'officiel, il est impensable de séparer l'imam de ses tweets, rapporte le média.
Ce dernier se voit désormais interdit "de faire des sermons en chaire, de donner des leçons de religion dans les mosquées ou de diriger des personnes en prière jusqu'à la conclusion d'une enquête sur ses opinions controversées, ce que le ministère n'accepte pas et que notre réalité actuelle ne peut tolérer".
Le Dar al-Iftaa d'Egypte - la principale institution juridique islamique du gouvernement pour l'émission de fatwas (édits religieux) - a quant à lui statué que le fait d'associer le harcèlement sexuel au type de vêtements que portent les femmes est une justification sans fondement faite par "des âmes malades aux passions sordides". Et ajoute que l'acte est banni dans la charia (loi islamique), ainsi qu'un "crime punissable par la loi".
Enfin, l'université Al-Azhar, autre institution religieuse, a affirmé que la criminalisation du harcèlement et des harceleurs doit être absolue et impartiale, quelle que soit la condition ou le contexte. "Justifier le harcèlement en raison du comportement ou des vêtements d'une femme exprime une mauvaise compréhension, puisque le harcèlement sexuel est une atteinte à la vie privée, à la liberté et à la dignité".