Un nouveau projet de loi familiale met en péril les libertés déjà largement fragilisées des femmes en Egypte. Présenté au Parlement égyptien en mars dernier, le texte en question propose effectivement d'imposer aux femmes le statut juridique de "mineures légales". Celles-ci seraient donc soumises aux autorisations de leurs tuteurs (masculins), même après la prononciation de leur divorce au tribunal.
Une réforme qui, dans le cadre dudit divorce, pourrait directement menacer le partage de richesses et des biens entre (ex) époux et (ex) épouses, mais aussi le droit des femmes divorcées à une pension alimentaire. Ou encore, leur autorité concernant leurs propres enfants. "Les lois familiales en Égypte ont toujours placé les femmes sous tutelle. Elles doivent bien souvent se référer à [l'homme] dans de nombreuses situations quotidiennes", déplore Hoda Elsadda, présidente de l'association féministe Women and Memory, au Financial Times.
Cette réforme, souligne Courrier International, a été largement pensée par l'imam Ahmed Al-Tayeb, qui l'aurait déjà proposé au Parlement national en 2018. Une situation critique en prévision dans un pays où les femmes disposent de peu de droits et peinent, par exemple, à obtenir un logement décent suite à leur séparation. Certaines d'entre elles, abandonnées par un Etat patriarcal, se retrouvent même à la rue, ultra précaires.
Une réalité douloureuse qui pourrait empirer sous l'effet de cette revalorisation du tutorat.
Comme l'explique encore le Financial Times, cette réforme conservatrice transgresserait ouvertement la Constitution égyptienne et les chartes internationales signées par le pays, en plus d'envoyer valdinguer les rares avancées sociales accordées aux citoyennes ces dernières années. "La structure de cette loi ne respecte pas les femmes et les dénigrent. Cette réforme ramènerait l'Égypte 200 ans en arrière", dénonce à ce titre Aboul Komsan, auteur de l'étude "Lutter pour les droits juridiques et politiques des femmes : un défi majeur".
Pour rappel, la mainmise très restrictive du tutorat peut notamment empêcher les femmes de voyager ou de se marier sans l'accord d'une autorité masculine - père, frère ou époux. Pire encore, cette absence d'indépendance poursuivrait les femmes jusque dans le cadre de leur séparation. Même en l'absence du père, l'autorité du tutorat masculin resterait effectivement supérieure aux yeux de la loi, concernant l'éducation des enfants, par exemple.
Au final, cette réforme provoquerait "un recul d'un siècle", si l'on en croit les propos du Centre pour l'assistance légale aux femmes égyptiennes, cité par le quotidien britannique, qui voit là une révision intensément "régressive" et archaïque des droits de la famille dans le pays. On ne peut mieux dire. Et espérer, à l'instar des nombreuses voix citoyennes et féministes qui s'érigent déjà en opposition, que cette réforme ne devienne pas réalité.