C'est lunaire de revoir ça en 2024.
Voilà le topo : nous sommes en 1995. Demi Moore est à l'affiche d'un film qui sera (hélas) considéré comme le plus grand nanar de sa carrière : Strip Tease de Andrew Bergman. Elle y côtoie Burt Reynolds, Ving Rhames et Robert Patrick. Mais la vraie star, c'est elle, ou plutôt ce qu'elle représente : le plus grand sex symbol des années 90.
Car vous le devinez, dans le rôle d'Erin Grant, Demi Moore interprète dans ce film une mère célibataire et strip teaseuse en proie à diverses péripéties - entremêlant performances "sexy" et représentant du Congrès américain. Or, tout le projet, son origine, et sa promo, se basent sur ce concept : Demi Moore en strip teaseuse, à une époque où celle-ci enchaîne les partitions sulfureuses - du thriller olé olé et très douteux Harcèlement (où elle harcèle sexuellement Michael Douglas, oui oui) à la vague histoire de triangle amoureux Proposition indécente.
Et comment Demi Moore va-t-elle présenter le film ?
En se rendant sur le plateau du célèbre late show de l'animateur David Letterman, une émission extrêmement populaire outre atlantique, afin d'évoquer ce projet mais surtout... D'effectuer un strip tease. Véritablement. En plein show télé, sous les clameurs du public...
Il faut voir la scène... Et en parler.
A la ferveur de David Letterman, et d'un public enflammé, Demi Moore se met donc à effectuer... Un vrai strip tease, arborant la même tenue que dans le film éponyme, où elle en arbore plusieurs, dans le cadre de la profession de son personnage. Une danse sexy s'ensuit.
Une séquence télé tout droit sortie d'un Tex Avery.
Alors que la star de The Substance revient aujourd'hui sur son statut de sex symbol avec amertume et surtout avec beaucoup de recul, elle dédie un regard bien plus critique sur cette hyper sexualisation à laquelle elle s'est elle même contrainte à Hollywood.
Cette scène lunaire est à l'écouter, si symbolique.
Cet instant médiatique, très relayé sur les réseaux sociaux aujourd'hui, est indissociable du film dont il assure la promotion : une star super-sexualisée, en petite tenue, observée de toutes parts par des hommes qui l'épient. C'est une représentation du "male gaze" : ce regard masculin qui plaque ses propres désirs et fantasmes sur les femmes et leur sexualité supposée. Un terme qu'on décrypte pour vous dans cet article.
Demi Moore semble ici "forcée" de déployer une telle attitude, en fonction des attentes que tout un système porte sur elle : elle, le sex symbol, l'actrice sulfureuse et libre, qui suscite le désir. Cependant, elle paraît aussi s'approprier cette image pour en faire une force.
C'est en tout cas là son opinion...
"L’une des idées fausses les plus répandues à mon sujet est que j’aimais mon corps", témoignera ainsi Demi Moore bien des années plus tard. "En réalité, j’ai souvent fait appel à des projets artistiques qui m’ont donné l’occasion de surmonter mes complexes. C’était pareil pour les couvertures de Vanity Fair où je pose nue : ce n’était pas que je les aimais, c’était plutôt une tentative de me libérer de cette prison mentale où je m'enfermais moi même".
"L’autre vérité, c’est que les choses provocantes m’ont toujours fascinée. Si on réfléchit à ce film, Striptease, on comprend qu'il y a tout un jugement intéressant porté sur ce personnage de femme qui travaille comme danseuse, tout en étant une mère essayant de prendre soin de son enfant du mieux qu’elle pouvait", décrypte la comédienne, qui a de nouveau partagé des photos du show de Letterman en 2015.
Près de dix ans plus tard, à l'écouter sur le plateau de C à vous, ce complexe face à son apparence est toujours aussi vif apparemment. Elle raconte : Elle raconte : "Dès que j'ai atteint la quarantaine, j'avais l'impression d'être encore trop jeune pour porter certaines histoires et d'un côté... Trop vieille pour être attirante. J'étais au milieu de nulle part, dans un no man's land, et je ne savais pas où j'appartenais"
L'intégralité de son témoignage se retrouve ici. "Quand j'ai porté un bikini pour le film Charlie's Angels 2 il y a 20 ans, on m'a reproché de ne plus avoir l'âge adéquat pour ce rôle", développe la star. Elle aborde ici une séquence qu'on a décrypté pour vous dans cet article.
Mais Demi Moore expliquera aussi que cette sur-sexualisation et cette obsession vouée à son apparence lui a fait beaucoup de mal. Psychologiquement, toute sa carrière durant, et physiquement. Strip tease par exemple a exigé beaucoup d'entraînements physiques.
Ainsi qu'un autre film culte et très "cul", qu'elle aborde ouvertement dans ce Témoignage à lire ici, et qu'elle décrit avec ces mots : afin d'incarner une amante libre sexuellement et désirante, elle s'est mis en tête de parcourir 48 kilomètres à vélo par jour pendant le tournage de ce film.
"Est ce que ca compte à ce point de faire tant d'efforts ? Probablement pas. Je pensais que ma valeur étant dans l'attirance que je suscitais. L'idée de ce que j'ai fait à mon corps, c'est tellement fou, tellement ridicule", déplore l'actrice qui met tout cet acharnement sur le compte d'une "quête de beauté"...