Violences en ligne, harcèlement, remarques bien sexistes... Entre deux exploits et spectacles mondialement applaudis, c'est un fléau qui est venu pointer son nez lors de cette nouvelle édition déjà historique des Jeux Olympiques : la grossophobie.
Autrement dit, l'ensemble de discriminations et violences visant les personnes grosses. Largement visibles dans la culture, la société, l'espace public... Et le plus grand des événements sportifs ne fait malheureusement exception. On le déplore largement.
Mais deux faits le démontrent de manière très concrète : le cyberharcèlement virulent que subit Barbara Butch, l'une des héroïnes iconiques de la cérémonie d'ouverture imaginée par Thomas Jolly, et les attaques dont a fait l'objet la championne de judo Romane Dicko.
Des exemples accablants. Qui renvoient aux pires préjugés, les plus banalisés, érigeant le sport en territoire bannissant toute tentative d'inclusion.
Il suffit de repérer la moindre recommandation "experte" de quelconque influenceur "muscu", ou les blagues les plus vaseuses qui affluent sur les réseaux sociaux tous les jours, pour le constater : on emploie toujours le domaine sportif pour railler les personnes grosses. Entre moralisme, clichés voire insultes décomplexées.
Cette année, l'édition 2024 des Jeux Olympiques l'illustre dramatiquement. "Tu prépares les JO du McDo ou du KFC", fait partie des remarques dont Romane Dicko a été la cible ces derniers jours, tel que le relate le site spécialisé Women Sports. Malgré deux médailles olympiques à son actif, oui. Tant et si bien que la championne judokate a réagi sur ses réseaux sociaux : "Je fais du haut niveau et j’ai des bourrelets. Oui, ça existe. Et ça ne m’a pas empêchée de faire du judo à un très haut niveau", affirme-t-elle à juste titre.
"Cela ne m'a pas non plus empêché de gagner les Championnats du monde, ça ne m’a pas empêchée d’être médaille olympique à Tokyo... Ce n’est même pas marrant ce genre de commentaires. Mûrissez. Ce n’est plus marrant ce genre de blagues. Attaquer le physique des gens n’est plus drôle. S’il vous plaît, on arrête ! Stop !"
Avec ce discours, Romane Dicko s'en prend à la méconnaissance des haineux, au sujet de la santé physique, des compétences sportives, du poids.
On a aussi très envie de dire "STOP" lorsque l'on constate la haine dont fait l'objet la DJ Barbara Butch. Celle qui posait aux côtés de Philippe Katerine lors d'une mise en scène audacieuse conciliant sacré et profane a reçu en quelques jours seulement des milliers de messages d’insultes, et ce dès la diffusion du spectacle.
"Énormément de violence en termes de menaces de mort ou d’atteinte à l’intégrité physique", énonce à franceinfo son avocate, Audrey Msellati. L'artiste queer a porté plainte ce 31 juillet. Au gré des commentaires que l'on peut lire en ligne, s'en prenant à la pertinence des performances proposées, la grossophobie est largement présente.
Barbara Butch a toujours dénoncé la grossophobie ordinaire. Il y a trois ans, la DJ LGBTQ devenait égérie Jean-Paul Gaultier. Autoproclamée "fat activist", elle affirmait alors : "Tous les corps ont le droit d'exister et d'être représentés, même dans la mode et le luxe".
Et, pourrait-on ajouter : dans le sport.
Cependant, constatait dans nos pages l'autrice Gabrielle Deydier (autrice d'une enquête et d'un documentaire nécessaires sur le sujet), "il y a toujours un décalage évident entre ce que l'on suppose et la réalité des faits. Oui, le terme "grossophobie" est mieux entendu dans la société, mais il ne suffit pas que les médias se l'approprient pour que la situation s'améliore vraiment".
Un "décalage" d'autant plus évident aujourd'hui. Même au moment des triomphes nationaux, force est de constater que la France est toujours aussi grossophobe.