La nouvelle était annoncée ce lundi sur la page Facebook Femen Belgique : la branche belge du mouvement cesse ses activités. Selon la porte-parole des sextrémistes concernées, Margot Fruitier, c’est l’organisation internationale du groupe Femen qui pose problème. Elles ont déclaré vouloir continuer de militer, mais d’une autre façon, « dans un mouvement qui sera le nôtre », précise-t-elle. L’organisation du groupe a déjà été décrite par d’autres comme « opaque » ou « pyramidale », les militantes n’auraient pas de pouvoir décisionnaire et seules les dirigeantes auraient la parole.
Au début du mois, un autre coup d’éclat entachait l’image des Femen. Le concept même du mouvement n’a pas été créé par ses figures médiatiques, mais par un homme aux méthodes assez douteuses : Viktor Sviatski. L’influence qu’il a eue sur les jeune femmes est révélée dans un documentaire. L’occasion d’apprendre qu’il a casté lui-même les Femen, qu’il considère comme des femmes « faibles », choisies uniquement « parce que les plus jolies filles vendent plus de papier ». Soudain, le groupe apparaît moins crédible.
Amina Sboui (ou Tyler) a fait pendant des mois l’actu des Femen, et l’objet de leur combat. La militante tunisienne avait été condamnée après avoir mené quelques actions chocs en Tunisie. Au Huffington Post Maghreb, elle déclarait fin août ne plus vouloir être associée au mouvement Femen, qu’elle considère comme islamophobe. « Il faut respecter la religion de chacun », indiquait la jeune militante. La décision est mal passée pour Inna Shevchenko, qui y voit une trahison.
Pour expliquer son départ, Amina Sboui exposait également ses doutes sur le financement des Femen, qu’elle juge douteux. « J'ai demandé à plusieurs reprises à Inna mais je n'ai pas eu de réponses claires », annonçait la jeune femme. Impossible en effet de trouver une réponse fiable à la façon dont les Femen organisent leurs actions, qui impliquent souvent des déplacements coûteux. On parle, pêle-mêle, d'un milliardaire inconnu, d’une femme d’affaires allemande (Beate Schober), du DJ allemand Helmut Geier, de l’homme d’affaires et fondateur d’un groupe de presse ukrainien Jed Sunden…
En débarquant à poil et à grand bruit, les Femen ne s’étaient pas fait que des amies du côté des féministes. Ahlem Bensaidani, militante à G.A.R.Ç.E.S, déplorait en juillet dans une tribune de ne jamais les voir dans les rangs d’une quelconque manifestation regroupant des associations féministes. Les Femen préfèrent la jouer en solo pour se mettre sous le feu des projecteurs. « Tant pis pour les milliers de femmes qui ont le mauvais goût de lutter pour leurs droits tout habillées », ironisait en mars dernier la journaliste Mona Chollet dans les colonnes du Monde Diplomatique. Jusqu’en juillet, Caroline Fourest était un de leurs seuls soutiens. Finito : après la polémique du tweet islamophobe, les Femen ne pourront plus compter sur elle.
Islamophobe, Inna Shevchenko ? L’Ukrainienne s’en défend, et décrète qu’elle est tout bonnement religiophobe. Un concept qu’elle et ses consoeurs se sont acharnées à défendre, en profanant tour à tour des monuments chrétiens ou musulmans. Les sexactivistes n’ont pas manqué de se faire traiter de féministes colonialistes, méprisant le croyant et assenant leurs vérités personnelles à tout-va. « Dans leur combat, les Femen respectent-elles les règles d'une société dont chaque membre serait respecté et entendu dans ses convictions ? », s’interroge l'auteur Éric Verhaeghe dans une tribune parue sur Newsring. Pas vraiment.
Les Antigones, un mouvement de femmes catholiques qui dénonce « les méthodes totalitaires et manipulatrices » des Femen, assenait il y a quelques mois dans un communiqué de presse que la dignité de la femme « ne passe pas par l’exhibitionnisme et l’hystérie ». En mai dernier, une membre du mouvement s’était infiltrée chez les Femen. Elle dit avoir été surprise par le manque de débat. « Ce qui m’a le plus surpris, c’est précisément qu’on ne parle pas beaucoup d’idées. (…) Elles sont beaucoup plus dans l’action. » La jeune infiltrée parlait aussi de militantes obsédées par l'image, d'une ambiance « narcissique » et d’une organisation « angoissante », sans dialogue, ni d’échanges d’infos.
Sans demi-mesure, sans autre forme de contestation, les Femen ont toujours le même modus operandi : un happening seins nus, couronne de fleurs sur la tête, le corps barré de slogans qu’elles s’emploient à hurler pendant les quelques minutes qui les séparent d’une intervention policière. L’occasion de s’ériger en martyres, grâce à une image d'innocente femme nue se faisant violenter par les forces de l’ordre. Mais au bout de plusieurs actions coup de poing, les Femen ne tourneraient-elles pas en rond ? Si pour l’heure certaines actions restent médiatisées, peuvent-elles continuer à choquer longtemps, à moins d’enlever le bas ?
Dès le début de leur médiatisation, alors qu'elles défendaient la cause des punkettes de Pussy Riot, les Femen divisaient. Elles avaient certes des détracteurs, mais avaient aussi réussi à s'attirer l'admiration étonnée de sympathisants. Aujourd'hui, à en croire les commentaires des internautes sur leurs actions, elles fatiguent plus qu'autre chose. Alors que pour récolter des financements (non douteux, cette fois) elles vendent des couronnes de fleurs faites de leurs blanches mains sur Facebook, les sexactivistes récoltent pas mal d'insultes.
En attendant, les Femen restantes ne semblent pas prêtes de se ranger. En août dernier était organisé le premier « Femen Summer Camp », une sorte de mini-colonie de vacances dans leur QG du Lavoir moderne. Au programme : footing dans Paris, séances d’abdos, conseils avisés pour bien poser devant les photographes et peaufinage de têtes « hargneuses », car la Femen doit « avoir l’air en colère ». Il semblerait que malgré tout, Inna Shevchenko et ses sexactivistes soient prêtes pour une rentrée musclée, n’en déplaise à leurs détracteurs.