Les officiels brésiliens n'en finissent plus d'alimenter l'actualité ces derniers temps. Malheureusement, la raison de leur présence au coeur de l'info est moins leurs prouesses politiques que leurs commentaires sexistes, misogynes et rétrogrades. Le dernier en date ? La volonté du maire de Rio de Janeiro de censurer la bande dessinée Les Justiciers, la croisade des enfants (Young Avengers, The Children's Crusade), d'Allan Heinberg et Jim Cheung, exposée dans les rayons de la Biennale de la ville, le plus grand festival littéraire du Brésil, sous prétexte que deux protagonistes masculins échangent un baiser.
"De tels livres doivent être couverts de plastique noir, scellés et avec un avis concernant le contenu", a ainsi déclaré Marcelo Bezerra Crivella, ancien évêque de l'Église universelle du Royaume de Dieu, un puissant mouvement néo-pentecôtiste fondé par son oncle, dans une vidéo publiée sur Twitter. "Il n'est pas bon pour les mineurs d'avoir rapidement accès à des sujets qui ne sont pas en accord avec leur âge", a-t-il poursuivi, demandant qu'on retire l'ouvrage des ventes par la même occasion - mais se défendant de faire preuve de censure ou d'homophobie.
Manque de bol, la justice brésilienne en la personne du juge Heleno Nunes, a non seulement statué en sa défaveur au nom de la liberté d'expression - et précisé que les autorités devaient "s'abstenir de saisir des oeuvres en fonction de leur contenu, particulièrement celles traitant de l'homotranssexualité" - mais son intervention a aussi fait décoller les ventes du livre édité par Marvel Comics, jusqu'à la rupture de stock. Les organisateurs de la Biennale ont également déclaré à l'AFP que leur événement était "pluriel" et donnait la "parole à tous les publics, sans distinction, comme cela doit être (le cas) dans une démocratie", rapporte Têtu.
Du côté de la presse aussi, on a choisi son camp. Le grand quotidien national La Folha de São Paulo a ainsi choisi de publier le dessin polémique en Une de son numéro du samedi 7 septembre, avec en titre "Crivella tente de censurer une bande-dessinée montrant un baiser gay mais se fait bloquer".
Un événement qui vient mettre à jour les véritables motivations du maire de Rio de Janeiro, qui avait pourtant prôné la tolérance peu avant son élection, et s'était même prétendu ouvert au mariage gay. En 1990 en revanche, il avait qualifié l'homosexualité de "mal terrible", rappelle Ouest France.
Mise à jour du 10/09 : La Cour suprême du Brésil, plus haute juridiction du pays, a également interdit à Marcelo Crivella de censurer la BD. "En démocratie, (...) les différentes convictions et visions du monde doivent pouvoir être exposées", a ainsi affirmé son président, José Antonio Dias Toffol.