L'allaitement maternel, un enjeu de santé publique mondial ? C'est ce qu'affirme une nouvelle étude financée par la fondation de Bill et Melinda Gates. Allant dans le sens de l'OMS qui préconise un allaitement exclusif jusqu'à 6 mois et un allaitement partiel jusqu'à deux ans, cette dernière confirme en outre le chiffre selon lequel l'allaitement permettrait d'éviter la mort de plus de 800 000 enfants par an.
Alors que la plupart des études se concentrent sur l'enjeu que représente l'allaitement dans les pays en voie de développement, laissant de côté les pays développés, cette analyse s'intéresse également aux bénéfices de la tétée pour ces derniers. "Il existe une idée fausse très répandue selon laquelle les bénéfices de l'allaitement maternel ne concernent que les pays pauvres. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité", souligne Cesar Victora (université fédérale de Pelotas au Brésil), qui a dirigé l'équipe scientifique. "Notre travail montre clairement que l'allaitement maternel sauve des vies et de l'argent dans tous les pays, riches aussi bien que pauvres."
Les auteurs de l'étude suggèrent non seulement que nourrir son enfant au sein est bénéfique à court terme, puisqu'il permet de réduire le risque de mort subite du nourrisson, mais que cela fait différence sur le long terme, y compris dans les pays riches : le lait maternel protègerait en effet de l'obésité et du diabète. En ce qui concerne les bénéfices pour la santé des mères, l'allaitement permettrait d'éviter 20 000 décès annuels par cancer du sein et serait également un rempart contre le cancer de l'ovaire.
Alors qu'au-delà de vingt mois, huit enfants sur dix ne sont plus allaités dans les pays à hauts revenus, les chercheurs recommandent que soient mises en place des politiques pour encourager l'allaitement "à tous les niveaux, famille, communauté, travail, gouvernement".
"Le succès ou l'échec de l'allaitement ne devrait pas être vu comme étant de la seule responsabilité de la femme. Sa capacité à allaiter dépend du soutien qu'elle reçoit et de l'environnement dans lequel elle vit. Il y a une responsabilité plus large qui pèse sur les gouvernements et sur la société dans son ensemble, qui doivent soutenir les femmes au moyen de programmes et d'initiatives", a déclaré Nigel Rollins, co-auteur de cette étude.
Au mois de septembre dernier, une nouvelle étude révélait qu'un enfant sur cinq seulement était encore allaité à l'âge de six mois en France, un chiffre assez bas par rapport à des pays voisins comme l'Allemagne et l'Italie. Le plus frappant dans cette étude était notamment la proportion importante de femmes qui renoncent à nourrir leur enfant au sein après le premier mois de naissance. S'il est essentiel d'insister sur le libre arbitre des femmes face à ce choix qui relève, rappelons-le, de l'intime, il n'est pas inutile d'insister sur l'absence de politiques destinées à accompagner les femmes qui prennent la décision d'allaiter en France.