Ils ont grandi après la libération sexuelle, sont abonnés à Tinder, et se retrouvent même sur Internet pour évoquer ensemble les meilleurs moyens d'atteindre la jouissance. Les millennials – ou génération Y en français – n'auraient donc aucun problème avec leur sexualité. Si l'on souhaite tomber dans le cliché, on pourrait même dire qu'étant débarrassés des carcans imposés par la société à leurs aînés, ces jeunes nés entre la fin des années 80 et le milieu des années 90 font donc forcément plus l'amour que les générations précédentes. Et c'est là qu'intervient une toute nouvelle étude menée par l'Université de San Diego aux États-Unis et publiée dans le journal Archives of Sexual Behavior : si les millennials aiment le sexe, ils le pratiquent finalement moins que leurs parents.
Pour arriver à cette conclusion, les scientifiques ont collecté les réponses d'un sondage mené entre 1972 et 2014 et concernant 26 700 personnes. Ils ont alors découvert que 15% des millennials âgés de 20 à 24 ans n'ont pas fait l'amour depuis leurs 18 ans, contre 12% des sondés nés entre les seventies et les eighties. Chez la génération X (nés entre 1966 et 1976), le chiffre tombe carrément à 6%. Pour trouver une génération sexuellement moins active que celle d'aujourd'hui, il faut finalement remonter jusqu'aux années 20 précise l'étude.
La génération Y est donc moins intéressée par le sexe que celles qui l'ont précédée. Mais reste à savoir quelle est la raison de ce désamour du cul. Selon les chercheurs, plusieurs théories entrent en jeu. Tout d'abord, les jeunes entrent plus tard dans la vie active et vivent plus longtemps chez leurs parents. Un combo qui les empêcherait de mener leur vie sexuelle comme ils l'entendent. Mais ceci n'explique pas tout. Les experts estiment aussi que les millennials doivent faire face à toutes sortes difficultés comme la pression du succès professionnel ou les idéaux physiques toujours plus inatteignables.
Viennent ensuite les réseaux sociaux et les sites et applis de rencontre. Selon Jean Twenge, la psychologue en charge de l'étude, "la génération Y est celle qui a vraiment commencé à communiquer par écran". Les rencontres physiques – et par ricochet les relations sexuelles - sont donc devenues moins fréquentes. Et puis il y a le souci du "vite, trop vite". Avec les nouvelles technologies, les jeunes ne prennent plus le temps d'apprendre à se connaître. Norman Spack, professeur au sein de la Harvard Medical School, indique : "La nature de la communication est devenue anti-sexuelle. Les gens ne passent tout simplement plus assez de temps ensemble".
Au rayon des nouvelles technologies, réseaux sociaux et sites de rencontres ne sont pas les seuls facteurs qui font évoluer la sexualité des jeunes. Le co-auteur de l'étude et professeur en psychologie Ryne Sherman, explique ainsi au site Mic que la génération Y n'a plus besoin de mettre le bout de son nez dehors pour se divertir : "Internet offre beaucoup de moyens pour se divertir seul : Netflix, les jeux vidéo, etc. Il est possible que les gens aient assez de contacts sociaux via ses mécanismes et ne ressentent donc pas le besoin d'entrer plus en contact avec les autres". Interrogé par le Washington Post, Noah Patterson, 18 ans, confirme cette tendance : "Je préfère regarder des vidéos sur YouTube et trouver un moyen de gagner de l'argent. Le sexe n'est pas quelque chose que les gens veulent voir sur votre CV".
Internet, l'origine de tous les maux ? Egalement interviewée par le WP, Stephanie Coontz, directrice de la recherche au Conseil américain des familles contemporaines, se veut plutôt rassurante. Car selon elle, il faut aussi prendre en compte un changement très important : la dédiabolisation du féminisme et une plus grande facilité pour les femmes de parler et de comprendre leur sexualité. Les jeunes filles n'ont tout simplement plus peur de dire non : "Comme l'on parvient de plus en plus à faire accepter la notion de consentement sexuel, les filles sont devenues plus pointilleuses sur ce qui constitue pour elles le consentement. Du coup, nous n'acceptons plus la pression qui peut être liée au sexe".
NB : menée exclusivement aux États-Unis, cette étude n'est pas représentative de la génération Y française.