En plus de proposer des collections similaires, les enseignes de prêt-à-porter se retrouvent sur un critère cher au merchandising : l'exposition dans les vitrines de mannequins extrêmement maigres. Les consommatrices se sont habituées à ces corps longilignes et irréels comme elles se sont accoutumées aux top models photoshopés à outrance qui trustent les pages des magazines. Mais ces dernières années, la donne a peu à peu changé. Grâce aux réseaux sociaux notamment, il est aujourd'hui possible de faire entendre sa voix auprès des marques, et même de les entraîner dans un "bad buzz". C'est ainsi qu'en 2015, les enseignes britanniques New Look et Topshop ont toutes les deux été épinglées pour leur utilisation de mannequins fortement émaciés, poussant la deuxième a assuré qu'elle allait changer sa politique à ce sujet. Deux ans plus tard, le Telegraph révèle que rien n'a changé. Chez Topshop comme ailleurs, la glorification de la maigreur reste de mise.
Ce phénomène a intéressé l'institut de psychologie et de santé de l'Université de Liverpool. Dans une étude publiée récemment dans le Journal of Eating Disorders, les chercheurs révèlent – comme on s'y attendait – que la plupart des mannequins disposés dans les vitrines "représentent des femmes sévèrement en sous-poids". Les chercheurs ont examiné 32 mannequins venus de boutiques présentes dans des rues commerçantes de deux grandes villes anglaises. Ils se sont vite aperçus que 100% des modèles affichaient un physique émacié. En comparaison, seuls 8% des mannequins masculins étudiés affichaient un poids alarmant. Eric Robinson, le docteur en charge de ces recherches, a estimé que les "résultats étaient cohérents". "La taille des mannequins féminins représentent des femmes en extrême sous-poids. Ces idéaux de maigreur absolue encouragent le développement de troubles alimentaires chez les jeunes gens. Nous devons changer notre environnement pour réduire la mise en valeur de cette minceur excessive", a-t-il ajouté.
Bien sûr, remplacer ces mannequins par des modèles plus ancrés dans la réalité ne résoudra pas tous les problèmes. Mais le Dr. Robinson assure que cette étape est importante pour créer une société plus saine : "Etant donné que les problèmes de troubles alimentaires et d'images corporelles sont déjà très élevés chez les jeunes, mettre en place des actions positives qui challengent notre idée du corps parfait peut-être bénéfique pour les fillettes, les adolescentes et les jeunes adultes".
En Grande-Bretagne, les tailles irréalistes affichées par les mannequins des magasins sont devenues un véritable sujet de société. En 2015, une enquête menée par le Daily Mail révélait ainsi que de nombreuses enseignes – H&M en tête - mettaient en scène des modèles affichant une taille de petite fille de 7 ans ! On est donc bien loin des mensurations types des Anglaises, qui tournent plutôt autour d'une taille 40 comme leurs voisines les Françaises. Pour contrecarrer les normes de beauté mises en avant dans les boutiques, mais aussi dans les publicités et les médias, la branche de l'association britannique YMCA a lancé en 2016 la campagne Be Real Body Image Pledge. En France, les mannequins exhibés chez Zara, Mango et consorts n'ont pas encore fait réagir les pouvoirs publics. Toutefois, la ville de Paris a récemment décidé de bannir toute publicité sexiste et/ou discriminatoire de son réseau d'affichage municipal.