Tout a commencé sur TikTok, lorsque la chanteuse et rappeuse américaine Lizzo a partagé une vidéo, le dimanche 13 décembre. Elle y expliquait avoir démarré une cure de jus detox de dix jours sur conseils de sa nutritionniste. Et bien qu'elle ait épinglé plusieurs recommandations sanitaires qu'elle jugeait essentiels ("N'essayez pas sans faire de recherches", peut-on lire sur le post, ou encore "pratiquez une detox sûre"), cette vidéo a suscité beaucoup d'attention. Et surtout, de controverse.
Rapidement, les commentaires désapprobateurs, voire parfois haineux, se sont accumulés. "Ce n'est pas sain", "N'essayez pas ça s'il vous plait", "Ne fais pas de promotion de ce truc !", "Noooon pas toi reine Lizzo avec cette connerie de detox". Autant de réactions qui exprimaient la déception de nombreux·se·s abonné·e·s face à ce qu'ils·elles considéraient comme un régime draconien.
Des critiques auxquelles l'artiste a d'abord rapidement répondues, lors d'une deuxième vidéo, assurant que ce qui l'avait motivée n'était pas la volonté de perdre du poids, mais le fait qu'elle ait "beaucoup bu et mangé beaucoup de nourriture qui lui a fait mal à l'estomac au Mexique". Il s'agirait plutôt d'une "remise à zéro" de sa digestion, assure Lizzo, notant que les résultats physiques étaient un bonus supplémentaire.
Une déclaration qui n'a pas vraiment calmé la horde de personnes inquiètes par le fait que son choix, et le fait qu'elle le communique en ligne, "puisse encourager les jeunes à ne pas manger". Une crainte qui, si elle est compréhensible devant l'influence de la chanteuse, ne justifie en aucun cas le cyber-harcèlement qu'elle a subi (dont les femmes noires sont les principales victimes).
Agacée, Lizzo s'est de nouveau exprimée sur les réseaux sociaux. "Femmes grosses, faites ce que vous voulez avec votre corps ! Je suis aussi fière des résultats de ma detox au smoothie que de mes courbes", a-t-elle garanti. Et de lancer : "Normalement, j'aurais tellement peur et honte de mettre en ligne des choses comme [une cure de detox] parce que j'ai l'impression qu'en tant que femme grosse, les gens s'attendent à ce que si vous faites quelque chose pour votre santé, vous le fassiez pour obtenir une perte de poids spectaculaire", déplore-t-elle. "Et ce n'est pas le cas".
"En réalité, novembre m'a fait perdre la tête", confie la jeune femme de 33 ans. "J'ai beaucoup bu, j'ai mangé beaucoup de choses épicées et de choses qui m'ont fait mal à l'estomac. Je voulais faire marche arrière et revenir à la case départ." Aujourd'hui, elle estime que c'est chose faite, et s'en réjouit. "Je suis tellement fière de moi. Je suis fière de mes résultats. Mon sommeil s'est amélioré, mon hydratation, ma paix intérieure, ma stabilité mentale, mon putain de corps, ma putain de peau, le blanc de mes yeux, je me sens et j'ai l'air d'une bad bitch, et c'est tout".
Des précisions qui tendent à prouver que sa démarche n'était pas de transformer son apparence, qu'elle célèbre au quotidien et qui inspire tant de personnes. Seulement, cette silhouette lui appartient, justement, et elle devrait être libre de faire ce qu'elle souhaite pour la modifier ou non. Et surtout, ses choix la concernant ne devraient jamais provoquer un tel accueil négatif et culpabilisant.
A ce sujet, la journaliste Meaghan Wray a appelé à ne pas reprocher à Lizzo de céder aux sirènes de la minceur, puisque ce serait lui reprocher d'être victime d'une société discriminante et normative. Et à plutôt se concentrer sur la source du problème : l'industrie de la beauté.
"Maintes et maintes fois, nous égarons notre colère", condamne-t-elle dans les colonnes du magazine Flare. "Nous attendons de nos héroïnes grosses (surtout lorsqu'il s'agit de femmes de couleur) qu'elles soient ces humains parfaits et inébranlables, infiniment insensibles à la pression de la société qui les pousse à être minces et conventionnellement attirantes. Lizzo n'est pas plus à l'abri de cette réalité que nous, les humains, ne le sommes. En fait, elle y est probablement confrontée encore plus fréquemment que nous, étant une grande célébrité qui est soudainement devenue le visage de la body positivité - et donc le sujet de nombreux abus liés au corps, grâce en partie à Jillian Michaels (la coach sportive aux propos grossophobes, ndlr) - sans jamais le demander."
Elle assène : "Nous devrions être en colère contre cette industrie multimilliardaire, pas contre Lizzo." Des mots qui font écho à de nombreux tweets de soutien, dont celui-ci, qui souligne un double standard vicieux, et rappelle avec émotion : "Lizzo ne peut pas être grosse, alors elle change de régime. Maintenant, elle ne peut plus être mince ! Merde, est-ce qu'elle peut être HEUREUSE ?! Quelle que soit la définition qu'ELLE en donne". Preach.