Le flot de reproches continuels dont font montre les observateurs envers les récentes performances de Miley Cyrus en devient tout autant pénible que les exhibitions excessives de la juvénile artiste.
Mais si l’on peut excuser les errements d’une jouvencelle de 21 ans en mal d’affirmation de soi, il est plus difficile de pardonner à des individus plus âgés. Car comme aimait à le rappeler F. De La Rochefoucauld « Les vieillards aiment à donner de bons conseils, pour se consoler de n’être plus en âge de donner de mauvais exemples ».
Ces personnes seraient-elles de celles qui au sortir de l’adolescence se sont rebellées un instant contre l’autorité pour mieux endosser le costume de conjoint passif et de parent modèle ? De celles qui fumèrent et composent aujourd’hui le contingent le plus virulent des anti-tabac. De ceux qui se perdaient dans les folles prairies de l’insouciance au fond des amphis, parfois avec des partenaires de même sexe, et qui des années plus tard conspuent les « filles faciles » ou manifestent avec véhémence contre le mariage pour tous. De celles …
Enfin vous voyez, de celles qui ont baissé les armes, se sont rangées, se posant en héritiers de la bonne morale pour voir en partie leurs rêves se réaliser. Elles reproduisent ainsi les schémas dument analysés par le sociologue P. Bourdieu et exercent par là même un « pouvoir de violence symbolique ».
En analysant plus en profondeur les prestations de Miley, il est pourtant simple de déceler les motivations latentes de la jeune naïade :
- une princesse Disney entourée de nains
Cela ne vous rappelle rien ? Mais cette fois « Blanche-neige » ne veut pas se laisser enfermer dans le rôle de future ménagère et être réduite à l’asservissement en ne prenant pas sa vie en main
- un clip avec un boulet de démolition et un marteau qu’on chérit
Deux outils assurément appropriés pour briser les murs, comme par exemple ceux du plafond de verre qui cantonne les femmes aux positions subalternes
- une langue qu’on tire
Comme A. Einstein dans sa célèbre photographie en noir et blanc, geste qu’expliqua le vieux physicien par le fait de « refuser de se prêter au jeu de la représentation, de livrer une image de soi conforme aux règles du genre ».
Il n’y a guère de doute quant au but de l’ex égérie Disney. Ses agissements dénotent une volonté d’affranchissement de l’individu face à une domination qu’il ressent comme assujettissante, une démarche vers l’indépendance. Le procès qui lui est fait actuellement est donc facile. Et si l’on peut l’accuser d’avoir un peu tort dans sa façon d’avoir raison, il est néanmoins bien moins dommageable que d’avoir raison dans la façon d’avoir tort. Et ceux qui l’en blâment devraient un instant penser à la définition des mauvais pères que donnait D. Diderot, « ce sont ceux qui ont oublié les fautes de leur jeunesse ».
Si un conseil pouvait leur être donné, c’est surement de méditer ce passage du « Hussard sur le toit » de J. Giono, celui où le héros reçoit une lettre de sa mère…qui ne souffre pas d’amnésie, elle.
« Mon bel enfant, as-tu trouvé des chimères ? Le marin que tu m'as envoyé m'a dit que tu étais imprudent. Cela m'a rassurée. Sois toujours très imprudent, mon petit, c'est la seule façon d'avoir un peu de plaisir à vivre dans notre époque de manufactures. […] Et maintenant, parlons de choses sérieuses. J'ai peur que tu ne fasses pas de folies. Cela n'empêche ni la gravité, ni la mélancolie, ni la solitude : ces trois gourmandises de ton caractère. Tu peux être grave et fou, qui empêche ? Tu peux être tout ce que tu veux et fou en surplus, mais il faut être fou, mon enfant. Regarde autour de toi le monde sans cesse grandissant de gens qui se prennent au sérieux.»