Le consensus affiché à l’Assemblée par tous les groupes politiques face à la déclaration de principe qui affirme la position abolitionniste de la France vis-à-vis de la prostitution, ne doit pas faire illusion. Dans la société civile et au sein des partis politiques, les avis sont très partagés au sujet d’une proposition de loi déposée dans la soirée par les députés Danielle Bousquet (PS) et Guy Geoffroy (UMP).
Que dit la résolution ?
Sans valeur contraignante, ce texte pose comme objectif pour la France « une société sans prostitution », et cela commence par ne plus accepter que l’on considère cette activité comme un métier : « La prostitution ne saurait, en aucun cas, être assimilée à une activité professionnelle », dit le texte. Pour Guy Geoffroy (UMP) « il faut désormais l’envisager [la prostitution] sous l'angle des violences faites aux femmes. Notre pays est abolitionniste depuis 50 ans et on doit entrer maintenant dans le concret et notre proposition de loi aura des incidences très concrètes ».
Une loi pour pénaliser les clients
Depuis le mois d’avril, cette loi était annoncée par les auteurs du rapport (rapport Geoffroy-Bousquet) sur la prostitution en France. Très controversée, mais fermement soutenue par la ministre des Solidarités Roselyne Bachelot, elle vise à pénaliser les clients de prostituées, à l'image de ce qui se fait en Suède depuis 1999. Les acheteurs de services sexuels pourraient être condamnés à deux mois de prison et à 3.750 euros d’amende.
Néanmoins le projet de loi déposé hier ne devrait pas être inscrit à l’ordre du jour de l'Assemblée avant 2012, il devra même sans doute attendre que la nouvelle Assemblée soit élue…
Les anti-abolitionnistes
Les voix ont été nombreuses à dénoncer cette idée de pénaliser les clients de prostituées, en particulier au sein de la Droite populaire. Lionel Luca, estime ainsi que le projet relève de « la démagogie la plus complète. La France invente l'eau chaude; par les temps qui courent, on a d'autres sujets à traiter! ». Mais c’est parmi les associations comme Act-Up et le Strass (Syndicat du travail sexuel) que les résistances sont les plus vives : venus manifester devant le palais Bourbon, leurs membres défendent les droits des travailleurs du sexe qui exercent par choix. Danielle Bousquet leur répond que « pour une personne qui affirme avoir fait ce choix, il y a des centaines de victimes ».
Alors que le collectif Osez le Féminisme s’est prononcé en faveur de cette résolution et de cette loi, la philosophe et féministe Elisabeth Badinter, s’est prononcée dans la presse contre l'abolition et la pénalisation. « Si une femme souhaite gagner en trois jours ce que d'autres gagnent en un mois à la caisse d'un supermarché, c'est son droit », a-t-elle dit, posant comme seule condition que la femme « ne soit pas contrainte ».
Avec AFP
Crédit photo : Assemblée nationale
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