Dominique Courtois* : C’est déjà une très bonne nouvelle de savoir que toutes les femmes pourront se faire retirer leurs implants si elles le désirent, il n’est en effet pas question de les y obliger. Nous réclamions cette mesure depuis un an, et cela s’est débloqué en 15 jours, notamment grâce à la mobilisation médiatique. Le point à préciser concerne la prise en charge : le comité de suivi a décidé mercredi dernier que le retrait et la réimplantation de nouvelles prothèses seraient remboursés pour toutes les femmes ayant été opérées suite à une chirurgie cancérologique et pour toutes celles dont la ou les prothèses seraient rompues.
D. C. : En effet pour celles-ci l’acte de réimplantation de prothèses ne peut être pris en charge par la Sécurité sociale, puisqu’il s’agit de chirurgie esthétique. Néanmoins nous avons demandé, et je pense que nous avons été entendus, à ce que l’acte de réimplantation se déroule dans le même temps que l’explantation –on limite ainsi les coûts à une seule opération et une seule hospitalisation-, et à ce que cela se fasse sans dépassement d’honoraires de la part des chirurgiens. Nous avons aussi obtenu de la part de certains fabricants que les prothèses soient gratuites pour les femmes dont la prothèse PIP aurait éclaté, et que le prix pour deux implants n’excède pas 300 euros pour les autres. Nous verrons si toutes ces doléances ont été retenues, mais je pense qu’un consensus est en bonne voie.
D. C. : C’est un challenge médical et chirurgical inédit, mais selon le professeur Laurent Lantieri, le grand spécialiste de chirurgie plastique qui fait partie du comité de suivi, ce serait faisable en 6 mois. Je tablerais plutôt sur un an, mais en effet je pense que c’est possible, si les hôpitaux prévoient des blocs dédiés pour cette démarche de grande envergure. Sur les 30 000 escomptées, certaines femmes se sont déjà fait retirer leurs implants depuis que la société PIP a été liquidée, tandis que d’autres refuseront de se faire opérer, et préfèreront se faire suivre régulièrement pour contrôler l’état de leurs prothèses.
D. C. : Cette opération ne présente pas plus de risques qu’une opération classique d’augmentation mammaire si les prothèses sont intactes. Ces risques sont existants –infection, œdème, hématome-, mais connus. En revanche lorsque l’une ou les deux prothèses sont éclatées, l’intervention peut durer entre 3 et 6 heures, et s’avère beaucoup plus délicate pour retirer le gel répandu au niveau de la glande mammaire et dans les tissus. Etant donné que la toxicité de ce gel est encore mal connue, il s’agit de ne pas prendre le risque d’en laisser in situ.
D. C. : La société PIP a été liquidée, et son gérant, insolvable, est en fuite à l’étranger avec une belle somme sous le bras. L’assureur de la société, avance, à raison, qu’il est également victime de l’escroquerie. Pour une indemnisation, il faudrait recourir à la commission d’indemnisation des victimes d’infraction pénale (CIVI), ou bien à la commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI). Mais cela exigerait une expertise fastidieuse sur des milliers de femmes, et seuls les cas graves seraient indemnisés. C’est pourquoi nous avons plutôt réclamé une prise en charge maximale pour que toute femme puisse se faire retirer ces implants sans que la barrière financière pose problème. En revanche, dans un deuxième temps nous demanderons à ce que les victimes des implants PIP bénéficient du « préjudice d’angoisse » via le CIVI. Ce préjudice a été créé pour les personnes exposées à l’amiante. Cela représente une indemnité de 7000 euros, qui serait versée aux femmes qui auront subi une rupture de prothèse PIP et qui seraient encore exposées au gel toxique de silicone.
*Dominique Courtois, médecin spécialiste des erreurs médicales, président de l’AAVAC.
Crédit photo : AFP
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