Sa cuisine « intelligente », où elle marie avec dextérité tradition brésilienne et influences européennes lui avait déjà valu de décrocher, l'an dernier, le titre de meilleur chef d'Amérique Latine. À 36 ans, la Brésilienne Helene Rizzo vient également d'être sacrée meilleure femme chef de 2014 par le jury du Prix Veuve Clicquot. Composé de plus de 900 jurés, pour la plupart restaurateurs, critiques et rédacteurs gastronomiques issus du monde entier, le Prix Veuve Clicquot récompense depuis 2011 la cuisine de cheffes d'exception.
Succédant à la Française Anne-Sophie Pic, à l'Espagnole Elena Arzak et à l'Italienne Nadia Santini, Helena Rizzo a réussi, selon les organisateurs du prix, à « enthousiasmer les critiques les plus coriaces ». Sous le charme, ces derniers ont loué sa « cuisine astucieuse, respectueuse des pratiques gastronomiques traditionnelles brésiliennes et des ingrédients [...] mariée aux techniques modernes avec une touche d'inspiration espagnole. »
Pourtant, rien ne prédestinait Helena Rizzo à être un jour désignée meilleure femme chef au monde. Avant d'officier aux fourneaux du Mani, le restaurant qu'elle a ouvert avec son mari à São Paulo en 2006, Helena Rizzo avait déjà une longue carrière derrière elle. Mannequin à l'âge de 17 ans, la jeune femme entame d'abord des études d'architecture. Mais, passionnée par la gastronomie, elle plaque tout quelques années plus tard et entreprend de gagner ses galons de cuisinière chez les meilleurs chefs. Multipliant les stages dans les meilleurs établissements de São Paulo, Helena Rizzo s'envole finalement pour l'Espagne, où elle décroche une place dans la brigade d'El Celler de Can Roca, un prestigieux restaurant de Gérone, en Catalogne. Parmi ses collègues, se trouve le chef Daniel Redondo, qui a fait ses armes auprès d'Alain Ducasse, et qu'elle finit par épouser.
De retour au Brésil, ils ouvrent ensemble le Mani - du nom de la déesse indienne du Manioc - dans la banlieue Jardim Paulistano de São Paulo. Très vite, leur cuisine fusion où se mêle cuisine traditionnelle brésilienne et influences méditerranéennes attire l'attention des critiques, qui se pâment pour leur spécialité : le manioca cuit au four et servi avec une mousse de tucupi (une sauce à base de manioc), de lait coco et d'huile à la truffe blanche. « Au Mani, nous essayons de faire de notre mieux tous les jours, parfois nous nous trompons, mais parfois nous faisons bien les choses », a déclaré Helena Rizzo après avoir remporté le Prix Veuve Clicquot. « Chacune d'entre nous peut être la meilleure selon la situation, à un instant T et selon telle ou telle personne. J'espère que cette distinction permettra au monde de la gastronomie de prendre davantage en compte le travail des chefs femmes et les magnifiques spécialités dont nous disposons au Brésil », a-t-elle ajouté.
Une vision que partage William Drew, rédacteur en chef de la revue britannique The Restaurant. « Nous sommes très fiers de présenter ce prix […] dans ce qui demeure un monde très masculin, nous pensons que célébrer la réussite des brillantes chefs femmes est d'une importance vitale, estime-t-il. Que les réussites d'Helena inspirent les générations futures de femmes à entrer dans cette profession, ce ne peut être qu'un résultat positif. » Helena Rizzo se verra remettre son prix le 28 avril prochain à Londres à l'occasion du l'élection des 50 Meilleurs Restaurants du Monde par la revue.