"Nous voyons parfois des patients d'un an qui ne possèdent que quatre dents, toutes cariées. Il ne reste alors plus que les racines et nous n'avons pas d'autre solution que les extraire".
Dans une enquête publiée sur Médiacités par la journaliste Virginie Mévielle, Angéline Leblanc, dentiste ayant exercé à Roubaix, sonne l'alerte. La spécialiste et d'autres médecins de la région remarquent de plus en plus de "bébés aux dents de lait tachées, noircies, dont il ne reste que les racines" parmi leurs jeunes patient·es.
A l'origine de cette expansion de caries dentaires précoces (qui surviennent avant 6 ans, ndlr) dans les Hauts-de-France ? Les habitudes alimentaires problématiques et surtout, la consommation de boissons sucrées et sodas. Les "bébés Coca", c'est le nom qu'ont donné les expert·es à ces cas.
"Nous accompagnons des parents en grande précarité sociale, qui ne savent parfois pas lire. Ils pensent bien faire et n'ont pas conscience que ce qu'ils font consommer à leurs enfants peut être nocif. Certains ne reçoivent que des biberons de Coca ou d'Ice tea...", observe encore Stéphanie Leclerc, responsable du Pôle petite enfance de la métropole lilloise au sein de l'Établissement public départemental pour soutenir, accompagner, éduquer (EPDSAE) de Lille. Et d'ajouter : "Les parents s'amusent à voir leurs bébés faire la grimace à cause des bulles. Ils leur en redonnent donc".
Un "jeu" aux conséquences dramatiques. "20 % de la population française concentre 80 % des problèmes de dentition", poursuit Angéline Leblanc. La faute à un manque crucial d'information et de sensibilisation à ce sujet relevant pourtant de la santé publique. "On essaye d'expliquer aux parents, mais, bien souvent, ils nous répondent qu'eux-mêmes ne boivent pas d'eau et ne voient pas où est le problème".
Plusieurs personnes interrogées plaident donc pour que des étiquettes "interdit aux moins de 16 ans" soient collées sur les boissons problématiques. Au Mexique, pour faire face aux répercussions dramatiques sur les enfants, ces mêmes produits sont interdits à la vente aux mineur·es depuis août 2020.