"Si une Dalaï-Lama féminine devait me succéder, il faudrait qu'elle soit attirante". Rien de très spirituel dans cette affirmation décochée par le chef suprême de l'église bouddhiste du Tibet himself. Le temps d'une interview accordée à la BBC, ce dernier est revenu sur plusieurs enjeux cruciaux du monde actuel, de Trump au Brexit, mais aussi sur quelques menus soucis - comme la question du "maquillage" de son éventuelle successeuse. "Sinon, les gens préféreront ne pas voir son visage", a-t-il ajouté. Élégant.
A écouter le sage de quatre-vingt-trois ans, l'attrait physique importe pour qu'une souveraine spirituelle soit regardée et prise au sérieux. Et la beauté intérieure dans tout ça ? Elle peut toujours aller se rhabiller. "Nous sommes des êtres humains, je pense que l'apparence est également importante", a suggéré le penseur à son interlocuteur circonspect, le journaliste Rajini Vaidyanatha. On repassera pour la leçon de philosophie.
"Elle devra avoir un visage très séduisant, sinon ça ne servira pas à grand-chose", avait déjà déclaré le Dalaï-Lama il y a quatre ans de cela - toujours à la chaîne de télévision britannique. Sur les réseaux sociaux, nombreux (et nombreuses) sont les internautes à se dire qu'il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. "On dirait que quelqu'un a pris le mauvais virage sur le chemin de l'illumination", a déploré la cinéaste militante Jennifer Siebel Newsom tandis que d'autres twittos s'en amusent : "'Si le futur Dalaï-Lama est une femme, il doit être aussi sexy que moi' - Le Dalaï-Lama".
Difficile de démontrer l'intérêt que l'on accorde aux droits des femmes et à leur condition tout en s'autorisant des sorties aussi misogynes. "Aujourd'hui, le put*** de Dalaï-Lama a déclaré que la seule façon pour lui de choisir une successeuse est de savoir si elle est objectivement baisable, donc je ne veux plus jamais entendre que 'les hommes ne sont pas tous comme ça'", s'est même indignée une autrice. Il faut croire que les voies du "Not All Men" sont impénétrables.
Cette opinion fait suite à une série de saillies plus ou moins glorieuses - et plutôt "moins" que plus - sur l'état de la société contemporaine - notamment l'immigration, enjeu auquel le leader répond par un éloquent "mieux vaut garder l'Europe pour les Européens". Une position qu'il affirmait déjà l'an dernier, lors de sa visite diplomatique en Suède. Beaucoup s'interrogent dès lors sur les véritables vertus humanistes de ces pensées éparses. Mais cela étonnerait que l'élévation de l'esprit soit à chercher dans le sexisme ordinaire.