En France, les femmes représentent un tiers des nouveaux individus infectés chaque année par le VIH, soit près de 2000 personnes. Parmi elles, il y a les populations de femmes plus vulnérables, comme les travailleuses du sexe, certaines femmes d'origine sub-saharienne, des femmes transgenres ou des libertines.
Comme le rappelle le Planning Familial : "Les femmes ne sont pas toujours en situation de négocier le préservatif ou toute autre forme de protection parce que leur position sociale est moins bonne. Demander à mettre un préservatif, parler de sexualité et de prévention peuvent être des tabous. Les femmes ne connaissent pas leur exposition particulière au risque de contamination du VIH et des IST, pensant que cela ne les concerne pas, le Sida restant une "maladie des hommes"."
Le fait de ne pas pouvoir imposer le préservatif à leur partenaire est un énorme problème en terme de prévention pour les femmes. Or, un traitement préventif contre le VIH existe : la PrEP. Une pilule bleu à prendre chaque jour, remboursée par la sécurité sociale et disponible en France depuis début 2017 mais encore peu connue. Elle s'obtient avec une prescription médicale, qui doit être renouvelée tous les trois mois.
La PrEP est un moyen efficace pour que les femmes se rapproprient leur prévention face au VIH. Pour faire la promotion de ce traitement disponible en France depuis début 2017, l'association anti-sida Aides a lancé la campagne #Prep4Love début juillet par le biais d'affiches et de clips. L'organisation rappelle que ce traitement préventif a fait ses preuves. Une étude réalisée qu'à San Francisco montre par exemple que " le nombre de nouveaux cas de VIH a chuté de 49 % entre 2012 (année où la PrEP a été autorisée aux États-Unis) et 2016 "
Camille Spire, porte-parole d'Aides, parle d'une nécessité quant à informer les femmes sur ce dispositif : "De toutes les personnes qui prennent la PrEP, seulement 1 % sont des femmes. Pourtant, cela leur permet de se réapproprier la prévention. Sur les 7000 personnes qui prennent la Prep, 97 % sont des hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes (hsh)."
Pour l'association Aides, ce chiffre de 7000 personnes sous PrEP est encore beaucoup trop minime pour enrailler l'épidémie en France. Pourtant comme le souligne Camille Spire : "92 % des personnes contaminées par le VIH chaque année en France on des critères d'éligibilité pour la PrEP".
En plus de cette campagne, un travail de terrain va être effectué pour toucher les publics de femmes les plus vulnérables. Les femmes migrantes et d'origines subsahariennes par exemple forment la plus grande cohorte des femmes contaminées selon des chiffres de 2012. Elles ont parfois du mal à imposer le préservatif à leur partenaire sexuel et sont mal informées sur la PrEP.
Pour faire de la prévention, les associations se rendent dans les salons de coiffure africains ou les bar afro-caribéens : "On essaie de travailler la manière de présenter les préservatifs et de donner des arguments aux femmes lors de groupes de paroles sur le fait que le préservatif peut aussi être un objet de plaisir et pas seulement une contrainte" raconte Camille Spire. Elle explique également : "Pour les femmes d'origine subsaharienne, il y a un manque de confiance dans le système de santé. Il y a aussi une question d'inégalité de soins sur le territoire." Mais, ajoute-t-elle : "Ce sont des personnes qui sont concernées par leur santé contrairement à ce que l'on entend parfois".
Le travail de terrain se fait également du côté des clubs libertins. En août, Laure Ellye Poyet, artiste peintre de 48 ans ira voir un·e médecin pour se faire prescrire ce traitement préventif. Libertine depuis vingt ans, elle a plusieurs partenaires par soirée, plusieurs fois par mois.
Elle voit les pratiques se dégrader dans les lieux parisiens qu'elle fréquente : "J'ai remarqué, depuis que j'y vais seule, les hétéros même "classiques" ne se protègent pas assez et c'est choquant et très embêtant. Il y en a plein qui enlèvent la capote et la PrEP permet aux femmes de se protéger."
Elle n'en oublie pas la prévention de base : "La PrEP, ce n'est pas le relâchement de la capote."
Le fait de s'engager dans ce traitement préventif lui permet également d'être suivie par des médecins sensibilisé·e·s qui ne la jugent pas mais également d'avoir un suivi plus global alors que la prescription de ce médicament doit se faire tout les trois mois : "Il y a des moments où on a trop peur, on ne veut pas voir, on n'ose pas faire le test. La PrEP ça permet de sortir de ses angoisses". En plus d'un suivi sur le sida, les médecins prescrivant la PrEP font des dépistages pour les autres infections sexuellement transmissibles.
Laure Ellye Poyet dit ne pas avoir peur de prendre une pilule par jour pour se protéger : "Il faut penser que c'est une petite chose pour éviter plus de choses. Il faut penser au plaisir immédiat mais aussi au long terme". Enfin pour elle, le libertinage c'est faire l'amour dans le don "et je ne veux pas donner des maladies".
La campagne de l'organisation Aides se poursuivra tout l'été partout en France. Les personnes souhaitant plus de renseignements sur la PrEP peuvent se rendre sur le site de Aides .