De Facebook à Instagram, il n'y a qu'à faire un petit tour sur les réseaux sociaux pour tomber dans une spirale d'envie et de jalousie. Le collègue en vacances à l'autre bout du monde, la blogueuse influente et ses 3 paires de Yeezy, l'ami d'enfance devenu chef dans un restaurant new yorkais... avouons-le, tout ça n'est pas forcément bon pour l'estime de soi. La bonne nouvelle, c'est qu'ils sont de plus en plus nombreux à utiliser les réseaux sociaux pour montrer la vie dans ce qu'elle a de plus naturel, et donc de plus beau. Stars du fitness qui n'hésitent plus à montrer leurs bourrelets, jeunes femmes qui s'attaquent aux photos faussement inspirantes qui pullulent sur Instagram, mères qui s'expriment librement sur les difficultés de la maternité... si toutes ces petites histoires ne font le buzz qu'un temps, elles sont en tout cas symptomatiques du ras-le-bol général face à l'image plus que parfaite que nous nous sentons obligé de renvoyer sur Facebook et compagnie.
Récemment, c'est une maman australienne qui a fait parler d'elle jusqu'aux États-Unis pour une photo de famille en apparence très banale. Kirsten Bosly pose avec ses deux enfants à la plage, elle est tout sourire, porte un chapeau de paille et un maillot de bain noir. Sauf que toute sa vie, Kirsten a détesté son corps tout en rondeurs. Alors, à chacune de ses virées à la mer, elle a caché ce vieil ennemi sous un paréo ou un short, et surtout, refusé qu'on la prenne en photo. Jusqu'au jour où l'Australienne a oublié tout son attirail à la maison. Arrivée sur le sable, Kirsten a d'abord paniqué avant d'avoir une véritable révélation, comme elle l'a expliqué à Today :
"Je me tenais sur la plage, je stressais à propos de mon corps, et puis j'ai eu un moment de clarté. J'ai réalisé que la seule personne qui me jugeait c'était moi-même. Personne ne faisait attention à moi et la seule chose qui m'empêchait d'avancer c'était ce sac de noeuds que j'avais créé et que je transportais partout avec moi".
Débarrassée de son sac de noeuds et de son paréo, Kirsten Bosly a pu profiter de sa journée pleinement et a demandé à son époux d'immortaliser ce moment avec une photo. Posté sur Facebook accompagné d'une jolie légende, le cliché a rapidement fait parler de lui, réunissant à ce jour plus de 4 000 "likes", 275 partages et 380 commentaires. Il faut dire qu'en choisissant de libérer son corps, Kirsten a aussi libéré sa parole, inspirant ainsi de très nombreuses personnes.
Elle écrit notamment : "J'ai quasiment toujours détesté mon corps. Je le méprisais, il me répugnait, j'éprouvais du ressentiment envers lui. Je voulais tellement qu'il change, qu'il soit plus petit, plus fin... moins gros. J'ai usé et abusé de lui. Je lui ai fait porter le chapeau pour beaucoup de choses. J'ai eu terriblement honte de sa manière de trembler, de ses fossettes, comme si tout ça définissait qui je suis. J'ai récemment vu passer une image sur Internet qui disait : 'posez sur les photos avec vos enfants car lorsque vous ne serez plus là, les photos sont tout ce qu'ils garderont de vous'. Et cette phrase a réveillé quelque chose en moi. J'ai toujours évité les photos car je ne supporte pas de me voir. Mais c'est terminé tout ça ! La vérité c'est que j'en ai assez d'avoir honte de mon corps. Il n'a rien fait d'autre que de me supporter pendant 41 ans".
Le message de Kirsten Bosly est peut-être une petite goutte d'eau dans un océan de photos filtrées et retouchées, mais elle démontre à quel point les femmes sont encore trop nombreuses à s'enfermer elles-mêmes dans des carcans. Soumises perpétuellement à des injonctions autour de leur physique, elles ont donc appris à dire "merde" aux diktats en utilisant un outil ultra porteur : le réseau social. C'est par exemple sur Instagram que la mouvance body positive est née et que des mannequins plus size ont réussi à imposer une autre idée du corps féminin. Si la plateforme (tout comme Facebook) est toujours aussi frileuse lorsqu'il s'agit de montrer un bout de sein, elle a en tout cas permis une libération de la parole et des corps. Vitrines irréelles de vies qui n'existent pas vraiment, les réseaux sociaux sont devenus un moyen pour certaines femmes de ne plus être dans la dépendance de l'approbation de l'autre. Un beau pied de nez à l'utilisation première de ces outils.
Avec sa petite photo de famille, Kirsten Bosly s'est délestée d'un poids très personnel et a touché des milliers de personnes. Outre les commentaires d'encouragement, l'Australienne a reçu un nombre importants de messages de femmes lui expliquant se retrouver dans son histoire. Touchée en plein coeur, elle raconte à Today : "J'ai reçu beaucoup de mails de femmes me racontant comment elles doivent se battre chaque jour contre la mauvaise estime qu'elles ont d'elles-mêmes et de leurs corps. Dans ces mails, des gens partagent un peu d'eux avec moi parce que j'ai partagé un peu de moi-même, et cela fait un effet dingue. C'est une leçon d'humilité et je pense que ça a changé ma vie". Une leçon d'humilité pour Kirsten, une photo déculpabilisante et inspirante pour le reste du web.