Il y a un an, quasiment jour pour jour, des milliers de femmes défilaient au lendemain de l'investiture de Donald Trump pour défier le nouveau président des États-Unis, plus prompt à insulter et à rabaisser les femmes que de les nommer à son gouvernement ou à rendre immuables leurs droits.
Inclusive et ouverte à toutes et tous, la Women's March de Washington avait rassemblé un demi-million de personnes, fermement opposées à la politique anti-immigratoire, conservatrice et liberticide promise par Donald Trump lors de la campagne présidentielle. Les organisatrices l'avait promis : si le nouveau président des Etats-Unis mettait les menaces qu'il faisait peser sur les droits des femmes à exécution, les "Pussy Hats" – ces bonnet roses, symbole de la résistance anti-Trump – reviendraient pour à nouveau battre le pavé.
C'est donc chose faite ce samedi 20 janvier, soit 364 jours après la tenue de l'historique Women's March. Organisée à Las Vegas, dans le Nevada, cette nouvelle manifestation intitulée "Power to the Polls" (le pouvoir est dans les urnes) avait un double objectif : montrer à Donald Trump et à son administration que ses opposant.e.s sont toujours là et plus déterminé.e.s que jamais, et surtout, mobiliser le maximum d'électeur.trice.s pour les élections de mi-mandat afin de faire élire davantage de femmes et de candidat.e.s progressistes.
"Nous pensions qu'une autre marche à Washington DC, serait purement symbolique et n'atteindrait pas nécessairement les objectifs de transformer un moment historique en un mouvement qui aurait un impact sur les communautés que nous cherchons à engager et à aider à transformer. Nous pensions que Power to the Polls est une prochaine étape importante qui nous donnera l'occasion de travailler à la base avec des partenaires et des individus engagés sur le long terme", avait déclaré à USA Today avant la manifestation Tamika Mallory, l'une des organisatrices de la Women's March. "L'année dernière, Donald Trump n'était même pas encore président (...) Au cours de l'année dernière, nous avons pu voir comment une partie de sa rhétorique s'est transformée en politiques et en procédures concrètes sur des communautés qui ont déjà du mal à lutter quotidiennement", a-t-elle ajouté.
Les femmes avaient en effet de bonnes raisons d'être en colère et de manifester ce samedi 20 janvier. Dès fin janvier 2017, le président commençait déjà à détricoter le droit à l'avortement en mettant fin à l'aide fédérale octroyée aux ONG soutenant l'IVG dans le cadre de leur politique de planification familiale à l'étranger. Il a également annoncé, ce jeudi, qu'il comptait créer une nouvelle division ministérielle consacrée aux libertés de conscience et religieuse. Celle-ci soutiendra les médecins et autres personnels médicaux qui refuseront de se plier à certaines procédures médicales qu'ils estiment contraires à leurs convictions.
Outre les coups portés au droit à l'avortement, Donald Trump a également engagé une procédure de déremboursement de la contraception, jusqu'ici prise en charge par les employeurs dans le cadre de la couverture santé qu'ils offraient à leurs employées. Clap de fin également pour les financements publics des cliniques du planning familial, prévus dans l'Obamacare.
Quant aux chercheurs affiliés à l'Agence de santé américaine, ils n'ont désormais plus le droit d'utiliser certains mots comme "foetus", "transgenre", "prestation sociale" ou "neutralité" dans leurs documents officiels.
C'est pour dénoncer toutes ces atteintes portées aux droits des femmes, et qui touchent en première ligne les personnes les plus vulnérables, que des milliers de personnes ont défilé dans les vastes rues de Las Vegas, mais aussi dans celles d'autres grandes métropoles américaines, Washington, New York, Los Angeles, San Francisco, Chicago en tête. "S'il y a eu un motif d'espoir au cours de l'année écoulée, il est venu de ces milliers de femmes qui ont trouvé leur voix pour riposter. Nous n'accepterons plus les agissements des hommes qui pensent avoir du pouvoir sur nous ou sur nos corps", a déclaré à la tribune Tammy Murphy, la femme du nouveau gouverneur démocrate du New Jersey, Phil Murphy, qui a aussi parlé de l'agression sexuelle dont elle a été victime lorsqu'elle était étudiante.
Galvanisée par le mouvement #MeToo, la Women's March de 2018 avait bien évidemment comme sujet fédérateur les violences sexistes et sexuelles auxquelles sont confrontées, parfois quotidiennement, les femmes. Alors que Donald Trump avait été épinglé lors de la campagne présidentielle pour avoir déclaré en 2005 qu'il fallait "attraper les femmes par la chatte" et suite au déferlement qu'a occasionné l'affaire Weinstein, le sujet était plus que jamais d'actualité. À la tribune, militantes et célébrités se sont succédées pour dénoncer les abus et les violences que se permettent certains hommes de pouvoir parce qu'ils croient au-dessus des lois.
Il était aussi question de se battre pour les droits des minorités et des personnes immigrées. Citée par Libération, Karol Ruiz, vice-présidente de l'association de défense des migrants Wind of the Spirit explique participer pour la première fois à une marche des femmes car elle n'avait jusqu'ici "jamais eu le sentiment que ces marches parlaient de [ses] problèmes. "Le harcèlement sexuel est un problème pour toutes les femmes et bien sûr, il faut s'y attaquer. Mais ce n'est pas, à mes yeux, le problème principal. Je marche pour les droits des immigrées, le droit à l'éducation, à se nourrir, au logement, le droit de ne pas être séparée de sa famille et de ses enfants par une procédure d'expulsion", a-t-elle jugé.
Outre les dizaines de manifestations organisées aux quatre coins des États-Unis, des mobilisations ont aussi eu lieu à Londres, Paris, Sydney, Madrid et Buenos Aires.
Ce qui n'a pas empêché Donald Trump de faire le malin. Cloîtré dans ses appartements de la Maison Blanche, en plein "shutdown" qui lui a empêché de se rendre sur le green en Floride, le président américain a cru bon d'adresser un message ironique aux participant.e.s à la Women's March.
Grand mal lui en a pris. Car si Donald Trump tweete comme il respire, il n'est pas le seul à avoir de la répartie sur le réseau social.