Un vent de révolution soufflerait-il sur l'Arabie saoudite ? Au vu de la répression (encore) actuelle des militantes féministes et de l'irrespect des droits fondamentaux des femmes, la réponse est ardue. Néanmoins, c'est une avancée sociale certaine que l'on peut aujourd'hui saluer : les femmes célibataires, veuves et divorcées pourront désormais vivre seules sans la permission de leur(s) tuteur(s) - père, frère, fils...
S'il semble inconcevable d'avoir attendu 2021 pour permettre cette autonomie toute relative des citoyennes saoudiennes, cette entorse au culte du tutorat, central en Arabie saoudite, n'a vraiment rien d'anecdotique dans un pays où le patriarcat opprime et étouffe les femmes - il suffit de lire une enquête comme celle de Hélène Coutard, Les Fugitives, pour envisager le pouvoir desdits tuteurs. Système quelque peu corrigé par le biais de cet "amendement législatif" évoqué par le journal Courrier International.
Selon le paragraphe B dudit amendement, dédié à la loi 169, "une femme adulte a le droit de choisir où vivre", et ne serait désormais plus "sous la supervision de son mahram [gardien]", comme le relève le média. De même, les familles ne pourront plus déposer de plainte contre les femmes qui ont décidé de vivre seules - car oui, cette pratique existait bel et bien. Des changements notables donc.
Comme le relève Madame Figaro, cette avancée prend place dans le cadre d'un programme national de réformes économiques et sociales intitulé "plan Vision 2030" et initié il y a cinq ans déjà par le prince héritier Mohammed ben Salmane. Cela fait effectivement quelques années que des évolutions s'observent. En 2019 par exemple, les Saoudiennes ont été autorisées à quitter le pays sans l'autorisation du tuteur. Soit un an après le passage d'une autre "permission", celle de prendre le volant.
Néanmoins, ces lois progressistes sont avant tout le fruit d'une chose : les luttes des militantes féministes, qui malgré cela ne cessent d'être surveillées, arrêtées, et torturées en Arabie saoudite, là-même où le féminisme est envisagé comme une forme de "terrorisme". A ce sujet, l'amendement passé en ce mois de juin précise que le tuteur masculin conserve malgré tout un pouvoir : celui de dénoncer la femme célibataire, veuve et divorcée, s'il possède des preuves "d'un crime commis".
Dans une société qui criminalise les femmes, la notion précise de "crime" reste encore à définir. Et la remise en cause du système, elle, est un long combat. "En Arabie saoudite, on répète aux femmes qu'elles ne sont pas esclaves des hommes mais que le système de tutorat est un système de 'protection'. On leur fait comprendre depuis l'enfance qu'elles n'ont pas besoin de leur liberté. C'est aussi pour cela que les mentalités mettent du temps à changer", déplore en ce sens la journaliste Hélène Coutard.