En juin dernier, les femmes saoudiennes ont obtenu le droit de conduire seule, d'aller voir des matches de football ou encore de pouvoir prétendre à des postes jusqu'ici réservés à leurs homologues masculins. Depuis le 1er août, elles peuvent désormais posséder un passeport et quitter le pays sans dépendre de la décision de leur "tuteur" (un parent ou (ex-)conjoint, toujours de sexe masculin).
Il s'agit de la dernière des réformes mises en place par le prince héritier Mohammed Ben Salman, dans une volonté de libéralisation du pays ultraconservateur. "Un passeport sera délivré à tout ressortissant saoudien qui en fera la demande", dont les femmes âgées de 21 ans ou plus, a rapporté le quotidien gouvernemental Umm Al Qura, citant les autorités.
De son côté, la femme d'affaires saoudienne Muna AbuSulayman parle d'une mesure "historique" : "Les rêves de certaines femmes ont été brisés à cause de leur impossibilité de quitter le pays pour (...) étudier à l'étranger, pour répondre à une offre d'emploi ou même pour fuir si elles le désiraient", a-t-elle commenté sur Twitter. "Ce changement signifie que les femmes sont sur la voie de prendre totalement le contrôle de leur destinée légale".
L'annonce du gouvernement statuait aussi le fait que les Saoudiennes ont dorénavant le droit déclarer officiellement une naissance, un mariage ou un divorce, et d'être titulaires de l'autorité parentale sur leurs enfants mineurs, confirme l'AFP. Des droits jusqu'ici réservés aux hommes. Mais l'avancée ne met pas entièrement fin au système de "tutorat" saoudien, ancré dans un gouvernement où la domination masculine règne en maître.
Par ce "gardiennage" qui régit leur vie, les Saoudiennes sont ainsi considérées comme éternellement mineures, un état qui est dénoncé depuis longtemps par les organisations de défense des droits des femmes. Et si le fait de pouvoir voyager sans que les hommes qui les entourent n'aient leur mot à dire est un pas énorme pour le pays, il reste de nombreux combats à mener pour que les ressortissantes y soient libres.
En Arabie saoudite, les femmes ne peuvent ainsi pas disposer de leur salaire, ni ouvrir de compte en banque seules. Beaucoup de leurs tuteurs traquent leurs moindres mouvements, comme du vulgaire bétail, par le biais d'une application mobile baptisée Absher ("Le prêcheur" en français) - sur laquelle ils ont également la possibilité de régler leurs amendes de stationnement.
En ce moment même se tient également le procès de onze militantes saoudiennes, dont Loujain al-Hathloul, qui se sont révoltées contre ce système de "tutorat", et sont aujourd'hui poursuivies pour des contacts avec des médias étrangers, des diplomates et des organisations de défense des droits humains, comme le rapporte l'AFP. En prison, elles racontent avoir été torturées et victimes de harcèlement sexuel.
Si de hauts dirigeants saoudiens souhaitent mettre fin à ce "gardiennage", ils précisent cependant qu'il ne pourra être démantelé que petit à petit afin de "prévenir toute contre-offensive des milieux les plus réactionnaires au sein d'une société profondément patriarcale", souligne l'agence.