Si les transports réservés aux femmes ne sont toujours pas d'actualité en France, où 100% des femmes y ont pourtant déjà été victimes de harcèlement, de nombreux pays ont testé leur efficacité sur le long terme. Pour certains, l'expérience s'est plutôt bien passée et a même permis de faire baisser le nombre de cas de harcèlement sexuel dans les transports. Mais quand les moyens ne sont pas au rendez-vous ou que la population y est hostile, l'expérience peut également se révéler être un véritable échec, comme le montre un article récemment publié par le Telegraph.
En 2006, la ville de Rio de Janeiro fait fonctionner des rames de métro et de train de banlieue réservées aux femmes. Pourtant, dès le premier jour, des hommes ne respectent pas cet interdit, comme le rapporte le journal national O Globo. Sept ans plus tard, le constat reste le même et les vigiles mobilisés pour veiller au bon usage du dispositif sont trop peu nombreux pour garantir un accès exclusivement féminin. Un problème qui met certaines femmes dans des situations très dangereuses, dès lors qu'elles se permettent de faire remarquer à un homme qu'il n'a rien à faire dans ces rames. En 2009, l'une d'entre elles s'est violement faite agresser à l'arme blanche avant d'être secourue.
Les Japonais ont instauré dès 2000 des rames de métro pour les femmes, afin d'éviter le harcèlement sexuel dans les transports. L'expérimentation est d'abord menée à Tokyo, où la municipalité décide d'estampiller 8 trains et deux métros du slogan "Women Only" (réservé aux femmes) avec des autocollants roses, lisibles en japonais et en anglais. Tout homme qui ose défier cette règle se fait aussitôt rembarrer par l'un des gardes en charge. Le dispositif a été très bien accueilli par la population. Alors que cela faisait près de 8 ans, que le harcèlement sexuel subi par les femmes dans les transports était en nette augmentation, les cas signalés aux autorités seraient aujourd'hui beaucoup plus rares. Le dispositif a même conquis les hommes, qui craignent parfois d'être accusés à tort en cas d'affluence.
Depuis le dispositif a été repris à Osaka, où les rames réservés aux femmes ne fonctionnent généralement qu'aux heures de pointes le matin entre 7h et 9h.
Comme le Japon, le Mexique s'est mis très tôt à introduire des transports 100% féminins en 2000. Dans ce pays d'Amérique centrale, les trains ne sont pas exclusivement réservés aux femmes, mais chacun d'entre eux possède quelques wagons spécialement pour elles. Une décision bien perçue par la population, qui respecte cette séparation et qui n'a donc pas vu d'inconvénients à ce que l'opération se poursuivre avec les "pinks taxis" (taxis roses), conduis le plus souvent par des femmes et équipés de boutons d'alarmes.
A Jakarta, les rames de métro réservées aux femmes ont fait leur apparition en 2012. Une expérience qui a vite tourné court puisque les wagons oranges et roses réservés à l'avant de chaque train étaient désespérément vides comparés aux compartiments mixtes bondés. Pour faire face aux protestations légitimes des usagers, les transports public de la ville ont finalement décidé de mettre fin à l'opération après seulement 7 mois de test. Malgré ce rejet manifeste de la population, la municipalité souhaiterait toujours remettre en place ce dispositif en faisant circuler plus de trains.
En Egypte, le harcèlement sexuel est tellement répandu qu'il est même surnommé "la onzième plaie d'Egypte" par la presse. Un phénomène difficile à endiguer, qui a finalement poussé les autorités à mettre en place des transports en commun réservés aux femmes en 2007. Si les vendeurs à la sauvette en profitent pour commercialiser leurs produits et accessoires dans ces rames, les femmes, elles, ne sont pas franchement satisfaites du service. Non seulement les wagons qui leurs sont dédiés ne possèdent bien souvent pas de places assises, mais en plus les hommes sont nombreux à transgresser l'interdit.
En 2012, le viol barbare de Jyoti Singh devient le symbole des violences insupportables faites aux femmes dans ce pays. Récemment, deux jeunes adolescentes ont d'ailleurs été obligées de se défendre à coups de ceinture dans un bus. Déjà très au fait de la situation catastrophique, les autorités décident dès 2009 de mettre en circulation des trains exclusivement réservés aux femmes. La mesure, qui concerne uniquement les villes de New Dehli, Calcutta, Bombay et Chennai, prévoit l'intervention d'agents de sécurité qui vérifient à chaque arrêt qu'un homme ne se soit pas infiltré à l'intérieur.
Mais il faut croire que les agents déployés ne sont pas assez nombreux. En 2010, un groupe de femmes a forcé un homme à faire des abdos pour le punir d'être entré dans une rame qui leur était réservée. Pour renforcer son action et tenter de faire changer les mentalités, la ville de Delhi a également décidé d'embaucher des femmes comme conductrices de bus depuis le début de l'année.
Depuis 2014, l'équivalent de la SCNF thaïlandaise a décidé de réserver des wagons spécialement pour les femmes sur trois des lignes de trains les plus empruntées du royaume. Une initiative prise suite au viol et au meurtre d'une adolescente de 13 ans dans un train couchette l'année dernière. Au lieu de l'habituelle couleur bleue caractéristique, ces rames ont été peintes en lilas et agrémentées de petits rideaux roses pour empêcher les regards indiscrets.
Cela fait de très nombreuses années que les derniers wagons des rames de métro de Téhéran sont réservés aux femmes. Un système rapidement entré dans les moeurs et qui s'est d'ailleurs répandu aux autres moyens de transport, comme les bus ou encore les taxis en 2006. Dans un pays où la pornographie est interdite et la prostitution punie de la peine de mort, les agressions contre les femmes ne sont pas rares. Les autorités religieuses n'hésitent d'ailleurs pas à diaboliser celles qui ne seraient pas voilées convenablement. Autant dire que les Iraniennes sont plutôt contentes de pouvoir se sentir en sécurité dans les transports.