Chaque jour dans le monde, 20 000 jeunes filles de moins de 18 ans donnent naissance à un enfant. C'est ce que révèle le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) dans son rapport annuel sur « l'état de la population mondiale » rendu public ce mercredi 30 octobre à Londres. Selon le rapport, 7,3 millions d'enfants naissent chaque année de mères encore adolescentes. Un chiffre inquiétant, qui pousse aujourd'hui l'ONU à tirer la sonnette d'alarme sur ce phénomène des « mères-enfants », souvent mésestimé et qui tend à prendre de l'ampleur dans les pays en développement.
Ainsi note l'UNFPA, 95% de ces grossesses précoces surviennent dans les pays en développement, notamment ceux situés sur le continent africain. 28% des femmes de 20 à 24 ans qui vivent au Tchad et en Afrique de l'Ouest (en Guinée, au Mali ou au Mozambique) sont devenues mères avant leur majorité. Au Niger, une adolescente sur deux a donné naissance à un enfant avant d'avoir atteint l'âge adulte.
L'Afrique subsaharienne est la région du monde la plus touchée par ces grossesses précoces. Selon les prévisions de l'UNFPA, le nombre de jeunes filles accouchant avant leurs 15 ans pourrait atteindre les 3,3 millions par an en 2030, contre 2 millions aujourd'hui.
Le sous-continent indien n'est pas épargné par le phénomène : au Bangladesh, « une fille sur dix a un enfant avant l'âge de 15 ans ». À titre de comparaison, « seules » 680 000 adolescentes issues des pays développées donnent naissance chaque année à un bébé, et la moitié survient aux États-Unis.
Surtout, rappelle l'UNFPA, les grossesses précoces sont symptomatiques, dans ces pays, d'un manque de considération pour les droits des enfants, et va souvent de paire avec un faible niveau d'éducation et des mariages d'enfants. « Nous sommes confrontés à un problème-clé, estime le docteur Dr Babatunde Osotimehin, directeur exécutif de l'UNFPA. Trop souvent, la société rejette tout le blâme de la grossesse sur l'adolescente alors que la réalité, dans la plupart des cas, est que cette grossesse n'est pas le résultat d'un choix délibéré, mais d'une violation des droits de l'adolescente qui, mariée de force à l'âge enfant, est privée d'accès à des soins de santé et à l'éducation ». Et de rappeler que neuf mères adolescentes sur dix sont mariées ou vivent avec leur conjoint.
Les grossesses précoces ont aussi des conséquences sur la santé des jeunes filles : parce que leur bassin n'est pas encore formé, les mères de moins de 15 ans ont deux fois plus de risque de mourir durant l'accouchement ou d'être victimes d'une fistule obstétricale. Les mères adolescentes sont aussi sujettes aux accouchements prématurés ou aux avortements spontanés. Chaque année, elles sont 70 000 à décéder des suites de complications de la grossesse et de l'accouchement, et 3,2 millions à subir des avortements dangereux.
Pour le Dr Osotimehin, « ralentir le phénomène des mères-enfants » est donc devenu un enjeu majeur. « Nous devons réfléchir aux changements à apporter aux politiques et aux normes appliquées par les familles, les communautés et les pouvoirs publics ». Le rapport préconise notamment de « favoriser la scolarisation des filles », de « mettre un terme au mariage d'enfants », d'accroître leur accès aux « services de santé sexuelle et reproductive », et de « modifier les attitudes relatives aux rôles attribués aux hommes et aux femmes ».
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