Les député·e·s espagnol·e·s ont adopté définitivement ce 16 février une loi autorisant aux personnes de 16 ans et plus de changer librement de genre, sans nécessiter l'autorisation de quiconque. En outre, sans diagnostic médical ou psychologique préalable, ou traitement hormonal.. Il s'agit de la "loi transgenre" ou "Ley trans".
Une initiative soutenue depuis longtemps au sein du gouvernement par les représentant·e·s du parti Podemos, à l'origine de cette loi importante. Ces derniers portent effectivement ce projet depuis quatre ans. Mais la "Ley trans" a également été largement défendue par la ministre espagnole de l'égalité, Irene Montero, qui voit là une forme de reconnaissance nécessaire des droits des personnes transgenres au sein de la société.
Beaucoup considèrent cette inscription dans la loi de l'autodétermination du genre comme une avancée révolutionnaire.
Mais ce n'est pas tout. Une loi autorisant un "congé menstruel" aux femmes souffrant de règles douloureuses a également été adoptée ce 16 février.
Directement financée par la Sécurité sociale, la loi dite de "congé menstruel" adoptée par 185 voix "pour" contre 154 "contre" répondra notamment aux besoins des femmes souffrant de pathologies graves comme l'endométriose - ce qui permettra au passage de médiatiser davantage cette maladie dont souffrent une femme sur dix. Toute femme souffrant de règles douloureuses pourra s'absenter du travail, pour une durée qui reste encore à déterminer. Un échange avec le médecin sera nécessaire au préalable.
Ce faisant, l'Espagne devient le premier pays européen à accorder des congés menstruels. L'idéal pour lutter contre les inégalités de genre et garantir aux femmes une meilleure santé menstruelle. Peu de pays accordent ce type de congés pour l'instant. On pense à la Corée du Sud, l'Indonésie, le Japon ou encore la Zambie. Même rareté concernant la "ley trans". Seuls quelques pays au monde, comme le Danemark, ont inscrit dans leur loi un droit identique. Pour la ministre Irene Montero, "c'est un jour historique".
Autant de mesures progressistes qui démontrent le retard alarmant de la France.
A quand ces avancées en France ? Beaucoup s'impatientent. En 2022, une enquête réalisée par l'IFOP auprès de 993 françaises âgées de 15 ans et plus nous apprenait ainsi que 66% des salariées seraient favorables au congé menstruel en entreprise, et que 64% pourraient y avoir recours. En outre, 66% des salariées interrogées estimaient qu'une boîte proposant un tel congé "serait plus attrayante". De plus, alors que le président Emmanuel Macron a reconnu l'an dernier l'endométriose comme "un vrai problème de société" exigeant une stratégie nationale de lutte, l'idée du "congé menstruel" semble d'autant plus riche de sens.
C'est dire si le modèle espagnol semble idéal. Il faut dire qu'il n'en est pas à son premier fait d'armes. Pour la France, il devrait être exemplaire, pour tout ce qui renvoie au respect des droits des femmes et des minorités. Ceux qui souffrent le plus des inégalités y sont pris en charge de manière concrète, dans le cadre d'une politique qui n'hésite pas à se proclamer "féministe" - terme cher à Irene Montero. On pense encore à une loi comme celle du "Seul un oui est un oui", exigeant "l'obligation d'un consentement explicite" dans le cadre des relations sexuelles, et intégrant donc noir sur blanc le consentement au coeur du code pénal espagnol.
Mais aussi au traitement des violences conjugales. En Espagne, un milliard d'euros annuel est consacré à la protection des femmes battues Un budget réclamé par les associations féministes en France. En Espagne, cela se traduit par exemple par des tribunaux spécifiques qui prennent en charge les cas de violences conjugales. L'accent est également mis sur la formation des professionnels, qu'ils soient policiers, juges ou personnels soignants, et le soutien judiciaire et social (l'aide pour l'accès au logement notamment) dont doivent bénéficier les victimes. Bien des points sur lesquels la France est encore trop à la traîne.